vendredi, 23 septembre 2022
CEUX QUI ONT LA SOLUTION (3 et fin)
Pour en finir (provisoirement) avec l'inventaire des formules utilisées dans les journaux (principalement Le Monde) par ceux qui savent comment faire pour s'en sortir ou pour faire advenir la société dont ils rêvent, je présente aujourd'hui un dernier type d'expressions qui permettent à un rédacteur de sauter par-dessus l'obstacle du "il faut" qui fait par trop "magie-magie", tout en contournant la facilité un peu niaise offerte par le verbe "devoir" mis à toutes les sauces. Comme on peut le constater, nul besoin de ces tournures trop évidentes pour faire comprendre au lecteur toute la force de l'impérieuse injonction qu'on lui adresse.
Ces dernières locutions présentent cependant l'avantage de prendre les couleurs de l'objectivité, ou tout au moins de revêtir le déguisement de la neutralité, comme si leur utilisateur se lavait les mains de toute intention de sommation au lecteur, l'auteur de la formule disparaissant derrière elle : phrase sans verbe, ou verbe à l'infinitif, et autres issues de secours. Je note quand même la survie du mode impératif, qui en dit long sur la psychologie de celui qui tient la plume. Quoi qu'il en soit, en reniflant le derrière de toutes ces solutions, je ne peux m'empêcher de leur trouver une fragrance assez prononcée de faux-cul (malpropre).
Je veux bien, mais l'énoncé me reste assez obscur.
On trouve ça dans Le Progrès. La phrase est applicable en l'état à tous les festivals.
Ça y est : le grand mot du second quinquennat d'Emmanuel Macron est lâché. On n'a pas fini de le lire, de l'entendre et d'en être gavés. Ensuite, quand on se rendra compte que la sobriété ne suffit pas, on passera au mot "restriction". En attendant mieux.
Là, pas de mode impératif, mais c'est tout comme.
Le genre de formule baudruche qu'une épingle bien placée suffit à rendre à sa vraie signification.
Ouais, je vais en parler à Christiane Lambert, P.-D. G. de la F.N.S.E.A., vous savez ce clan dominé non par des paysans, mais par des chefs d'entreprises agricoles pour qui cultiver la terre ne relève pas d'une activité humaine mais d'un système industriel asservi à de merveilleux engins mécaniques comme à des intrants chimiques aux remarquables effets.
Ce titre me laisse coi, bien qu'on lise sans peine l'injonction "il faut" en filigrane derrière "en finir".
***
MORALITÉ :
Tout ce qui ressemble, de tout près ou de très loin, à la formule "IL FAUT", est à considérer, sinon comme un mensonge, du moins comme une incantation incantatoire..
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jeudi, 22 septembre 2022
CEUX QUI ONT LA SOLUTION (2)
La formule sacramentelle "il faut" (voir ici même il y a quelques jours) accepte quelques expressions de sens équivalent. Voici la plus fréquente. On voit que l'usage (et l'abus) du verbe "devoir" peut toucher toutes sortes de sujets. Attention : on ne rigole pas !
Les titres ont tous été publiés dans le journal Le Monde (un seul dans Le Progrès) entre juillet et août 2022.
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jeudi, 15 septembre 2022
CEUX QUI ONT LA SOLUTION
Je sais pas vous, mais il y a quelque chose, dans le paysage de notre monde mal barré, qui me fait toujours autant rire, braire et m'apitoyer, dans la façon dont "certains" (en français : des intellos) évoquent les problèmes, les situations et même les événements. A les écouter, ces braves gens, il suffirait de prendre au sérieux leurs propos et appliquer les recettes qu'ils mettent sur la table, pour que les problèmes se résolvent et que les situations s'éclaircissent. A cet effet, ils disposent d'un « Sésame, ouvre-toi ! » dans l'immémoriale expression IL FAUT.
Je me souviens que le journal Le Monde a publié dans ses pages, dans les années 1970, toute une série de dessins d'un nommé Konk, une série intitulée "Faukon, Yaka et Pitucé" (pas besoin de traduire), où il se moquait de ces gouvernants de comptoirs qui détiennent, après quelques apéros, les clés de la bonne gouvernance du pays. La collaboration n'a pas duré trop longtemps, car assez vite on a vu Konk aller mouvoir ses nageoires dans les eaux sales voisines du Front National de Jean-Marie Le Pen, voire dans diverses cellules et officines un peu plus "musclées". Au Monde, on a dit : "Pas de ça, Lisette". On le comprend.
Reste que je demeure abasourdi quand, dans les pages du même Monde, il m'arrive encore de tomber sur des titres contenant la formule sacramentelle autant que passe-partout : il faut. Ces titres, on les trouve en général dans les pages "Débats" du journal. Alors bien sûr ce sont des collectifs, des trios, des tandems ou des individus qui profèrent l'expression fatidique et qui n'engagent nullement la responsabilité du quotidien.
Tous les titres qui figurent dans la petite rafale ci-dessous sont tirés de numéros récents, témoignant de l'étonnante santé d'une formule dont je subodore qu'elle ne doit sa survie qu'à l'indéracinable dose d'espoir qui, chez les humains, signifie l'impossibilité absolue (ou presque) de renoncer à envisager le futur en fermant la porte au nez des lendemains qui chantent. « Il faut subir ce qu'on ne peut empêcher », dit quelque part Jorge Luis Borgès. C'est exactement là que l'homme commence à rêver. C'est là qu'on franchit la frontière de l'imagination. La formule "il faut", c'est empêcher la porte des possibles de se refermer.
A cet égard, j'aime particulièrement les articles de fond produits par des journalistes sérieux et si possible chevronnés, et construits comme des dissertations normales ou comme des notes de synthèse, vous savez : 1 - constat ; 2 - causes ; 3 - perspectives. La troisième partie doit faire la preuve que la situation n'est pas désespérée. Ensuite, le rédacteur est invité à faire preuve d'ingéniosité pour éviter le grossier "il faut". Car la langue française abonde en ressources diverses et en moyens astucieux de tourner autour du "il faut".
En général, j'admire de tels articles aussi longtemps qu'ils décrivent le problème dans tous ses aspects et qu'ils entreprennent d'expliquer l'origine de ce problème : la virtuosité du journaliste peut se donner libre cours. Et puis vient la troisième partie, et patatras ! le cousu de fil blanc apparaît en pleine lumière. L'auteur de l'article y va de ses solutions, de ses propositions, de ses hypothèses, des mesures et des décisions à prendre. Mais il aura beau mettre en œuvre tout son talent pour costumer et grimer le "il faut" sous toutes sortes de fards et de fonds de teint, il butera immanquablement sur le mur du "comment on fait ?". Autrement dit : comment on passe du virtuel au concret ?
La petite suite que je présente ci-dessous n'est qu'un modeste échantillon (été 2022) des manifestations du pouvoir du "il faut" dans les cerveaux de ceux dont le métier est de penser.
Ouais, t'as bien raison, mais tu peux nous dire comment on fait, monsieur le savant ?
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Le Système ? Ouais, l'idée est bonne. Reste plus qu'à nous dire
COMMENT ON FAIT,
crâne de piaf !!!
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Ouais, tout le monde va se mettre autour de la table, comme un gros tas de chouettes copains ! On va dire ça à l'Egypte, au Soudan et à l'Ethiopie pour le partage des eaux du Nil. On dira ça à la Turquie, à la Syrie et à l'Irak pour le partage des eaux du Tigre et de l'Euphrate. On dira ça ...
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Ah, l'implication des citoyens, un beau cheval de retour ! Allez, on vous fera de splendides "Conventions Citoyennes" ! Monsieur Macron aura plein la bouche de beaux discours ! On appellera ça "concertation", et au bout du compte, personne ne sera satisfait.
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Celui-ci, je le trouve particulièrement réjouissant : il me fait penser à une "évaluation à l'entrée en seconde" dont j'ai eu à connaître jadis. Parmi les 32 items des "objectifs" (on ne jurait alors que par la "pédagogie par objectifs"), le premier stipulait cette commination impérieuse et porteuse de tout le programme élaboré par la cohorte des crânes d'œuf qui préside depuis cinquante ans aux destinées de l'Education Nationale, pour le plus grand malheur de celle-ci et de la France : « MAÎTRISER L'ORTHOGRAPHE ». Il aurait fallu demander sa recette au crâne d'œuf. Dans le cas présent, je m'interroge : l'auteur peut-il me citer une période où l'humanité fut gardienne de la planète ("redevenir") ?
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Traduction : attendez-vous à des restrictions !
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Günther Anders est un philosophe. Il est l'auteur, entre autres, d'un ouvrage qui m'a profondément marqué : L'Obsolescence de l'homme, dans lequel il propose le concept de "honte prométhéenne" qui, à mon avis, résume et condense tout le problème des relations entre l'homme et la technique. "Prométhée", c'est l'audace, l'énergie, la créativité, l'inventivité phénoménales dont est capable l'humanité. "Honte", parce que l'homme se rend compte qu'il a donné naissance à des forces sur lesquelles il n'a plus aucune prise (exemple de la bombe atomique). Des forces incommensurables à sa petitesse : les Lilliputiens ont fabriqué Gulliver. Ils ont créé un "Golem".
Dans son bouquin, il évoque la figure d'Ernst Bloch, autre figure de la philosophie germanique, auteur, entre autres, de Le Principe espérance., mais c'est pour lui faire un reproche : « Il n'a pas eu le courage de cesser d'espérer, ne serait-ce qu'un moment ». Si Günther Anders avait été haut fonctionnaire obligé de rédiger une note de synthèse pour un ministre, nul doute qu'il aurait soigné les parties 1 - constat et 2 - analyse des causes, et qu'il aurait arrêté là son texte.
Pour lui, toutes les solutions partielles sont des illusions, voire des impostures. Pour lui, tous les "il faut" qui tentent d'aménager tel ou tel aspect du problème, et non de s'attaquer à la racine de celui-ci, sont autant de mensonges. Pour lui, c'est tout l'édifice de notre civilisation fondée sur la confiance aveugle en les bienfaits de la technique qui est une erreur à la base. Günther Anders reste un des seuls (le seul ?) à ne pas nous beurrer la tartine et à refuser de toujours "finir sur une note d'espoir".
CESSER D'ESPÉRER. Autrement dit : arrêter de rêver tout éveillé. Autrement dit : du tragique en philosophie. C'est ça que ça veut dire, "regarder la réalité en face".
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : journal le monde, journalistes, konk, front national, jean-marie le pen, emmanuel macron, président de la république, convention citoyenne, dennis meadows, joëlle zask, günther anders, l'obsolescence de l'homme, ernst bloch, le principe espérance, honte prométhéenne
mercredi, 07 septembre 2022
RÉSULTAT DES COURSES ?
Les jours passés, je me suis amusé — si l'on peut dire — à accrocher à mes cimaises virtuelles des titres de journaux (essentiellement Le Monde, parce que c'est celui-là que j'achète tous les jours, ou presque) parus pendant ces deux mois d'été. Il m'a semblé que, après l'aventure COVID, le climat avait cessé de nous envoyer des coups de semonce, mais s'était mis à nous balancer des obus de plus en plus gros, précis et serrés. La preuve, c'est que la surmortalité de la période se monte, paraît-il, à 11.000 personnes, selon l'I.N.E.D. (l'I.N.S.E.E. ?) Je me permets donc de revenir à une idée folle que j'ai formulée ici même voilà quelque temps déjà, en proposant à l'humanité (oui, c'est vrai, je vois un peu grand) de rédiger enfin une
DÉCLARATION UNIVERSELLE DES LIMITES HUMAINES.
Je sais, c'est pas gagné et c'est pas demain la veille. Aucun écho jusqu'à présent.
Le gars ci-dessous s'appelle Mordu. C'est le neveu de maître Mïlé, un brave homme impitoyable qui a appris à nager dans les eaux les plus sales qui puissent exister.
Dessins au trait violent tirés d'une saisissante B.D. très très noire : Europa, d'un nommé Tomas Lavric TBC, par ailleurs inconnu au bataillon (deux volumes, Glénat, 2003-2004). Je me suis permis d'ajouter quelques mots au texte original.
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Alors à quand, la
DÉCLARATION
UNIVERSELLE
DES LIMITES
HUMAINES ?
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Tout le monde sait.
Beaucoup ont compris.
Combien veulent ?
S'il vous plaît, ne répondez pas.
09:00 Publié dans L'ETAT DU MONDE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : déclaratino universelle des limites humaines, bande dessinée, tomas lavric tbc, éditions glénat, journal le monde, i.n.e.d., covid 19
mardi, 06 septembre 2022
OH L'AGRÉABLE CHALEUR !!!
Je n'apprendrai ici rien à personne, le souvenir est tout "frais" dans les mémoires : il a fait chaud.
Heureusement, il n'a pas fait chaud tout le temps : il a d'abord fait très chaud ; ensuite il a fait très très chaud ; et puis il s'est mis à faire très très très chaud. Maintenant, il fait un peu moins chaud : c'est dire si on s'habitue, finalement. C'est heureux, diront certains, car ça veut (peut-être) dire que nous nous adaptons (Le Monde du 1 septembre 2022).
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Et non seulement nous nous adaptons, mais nous ne sommes pas les plus à plaindre (Le Progrès du 8 août dernier).
Parions qu'en se montrant assidus à un tel entraînement, les Iraniens s'adapteront plus vite et plus fort au changement climatique.
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Alors pas d'affolement, restons calmes et rassurons-nous : LE PIRE EST A VENIR. Mais on les attend de pied ferme, les vagues de chaleur !!!
Le Monde, 11 mai 2022.
J'adore l'expression "déficit hydrique" pour dire "manque d'eau" ou plus simplement : "J'ai soif" : on sent que le gars tout content d'avoir trouvé ça est passé par les écoles. Et disons-le : ça fait tout de suite plus sérieux. Je me vois bien dire à un pote : « Tu viens ? Je suis en déficit hydrique. Je te paie un demi. »
Le Monde, 19 juillet 2022.
Le Monde, 11 août 2022.
Et tant pis pour les tortues (Le Progrès, 8 août 2022) !!!
On connaissait le changement de sexe des poissons du côté du lac Érié sous l'influence des médicaments rejetés dans l'eau, en particulier des substances hormonales, contraceptives ou autres. Mais il est interdit d'arrêter le progrès.
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ET BONNE RENTRÉE, HEIN !!! ON VA SE SERRER LES COUDES, LES DENTS, LES FESSES ET LA CEINTURE, HEIN !!! ON VA SE TENIR CHAUD, HEIN !!! ET VIVRE ENSEMBLE, HEIN !!! ET FAIRE SOCIÉTÉ, HEIN !!! COMME AU BON VIEUX TEMPS, HEIN !!!
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Fin de la série, mais pas du processus.
09:00 Publié dans ECOLOGIE, L'ETAT DU MONDE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : réchauffement climatique, écologie, journal le monde, journal le progrès
lundi, 05 septembre 2022
OH LA BELLE SÉCHERESSE !!!
Hergé et Peyo sont d'accord.
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D'abord une grande découverte, et même, n'hésitons pas, une révélation : les plantes ont besoin d'eau pour exister, survivre et se développer (Le Monde 18 août 2022). Merci au journal "de référence" : du coup, le lecteur se sent moins bête.
Reconnaissons-le : il fallait que cela fût dit, n'est-ce pas ?
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On voyait ce paillasson garanti grand teint et très grande dimension le 10 août dernier à Rancourt dans la Somme (Le Monde 18 août 2022). Si j'étais un ruminant, pas sûr que j'aurais envie de brouter ce tapis-brosse (non, je n'ai pas dit "gazon maudit").
Le Monde 18 août 2022.
Le Monde 7-8 août 2022.
Le Monde 19 juillet 2022.
Le Monde 14-15-16 août 2022.
Le Monde 14-15-16 août 2022.
Le Monde 20 août 2022.
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Alors la présente sécheresse a-t-elle battu le précédent record, détenu jusqu'à maintenant par l'été 1976, comme le montre cette couverture de Charlie Hebdo parue le 8 juillet 1976 et dessinée par Reiser ?
L'été 2003, c'était seulement la canicule, vous savez, celle qui avait imperceptiblement abaissé la moyenne d'âge des Français en ôtant brutalement de la tranche supérieure (pour parler dans les termes autorisés des démographes de l'I.N.E.D.) 15.000 de nos concitoyens.
09:00 Publié dans ECOLOGIE, L'ETAT DU MONDE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : écologie, réchauffement climatique, bande dessinée, les aventures de tintin, capitaine haddock, le crabe aux pinces d'or, hergé, peyo, la guerre des sept fontaines, johan et pirlouit, sécheresse, journal le monde
dimanche, 04 septembre 2022
OH LES BELLES RIVIÈRES !!!
Vignettes piquées à la page 26 de En Remontant le Mississipi, texte et illustration de Morris.
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Journal Le Monde 14-15 juillet 2022.
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Journal Le Monde 2 août 2022.
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Journal Le Monde 10 août 2022.
A mon avis, l'argument purement technique de la "mauvaise gestion" a bon dos. Il s'agit plutôt d'une volonté d'accaparement des pays situés en amont (Turquie, Syrie). Même problème pour le Nil (Ethiopie, Soudan, Egypte) ou pour le Mékong (Laos, Thaïlande, Cambodge, Vietnam). Et ne parlons pas du Jourdain. La guerre de l'eau a déjà commencé, à coups de barrages. A la place de Jean-Michel Bezat, je n'aurais pas mis de point d'interrogation à ma chronique du 30 août 2022 dans Le Monde.
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Journal Le Monde 17 août 2022.
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Journal Le Monde 28-29 août 2022.
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Journal Le Monde 18 août 2022.
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Journal Le Monde 18 août 2022.
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Mais certains cours d'eau ont l'esprit de contradiction (Le Monde 30 août 2022). Là, c'est l'Indus qui manifeste sa furie. Allez comprendre !
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Et quand il n'y aura plus ni de fleuves ni de rivières, il n'y aura plus de poissons d'eau douce, il n'y aura plus de pêcheurs de truites ou de brochets, il n'y aura plus de permis de pêche et plus de garde-pêche pour alpaguer les galapiats qui pêchent impunément à la main" (ceux que je connais le mieux), au nez et à la barbe de la loi. Pire : il n'y aura plus de Cérigoule (Sérigoule ?) ou de Ruisseau de Chaumargeais. Mais je garderai, dans le gras du bout de mes doigts, le souvenir du ventre soyeux des truites planquées sous les grosses pierres plates, que nous caressions avec infiniment de délicatesse avant de les saisir brutalement et de les jeter dans l'herbe. Bon, c'est vrai, elles ne faisaient pas toujours la maille. Mais il y a prescription, monsieur l'agent : fallait nous pincer avant.
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ET BONNE RENTRÉE, HEIN !!!
09:00 Publié dans ECOLOGIE, L'ETAT DU MONDE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : réchauffement climatique, écologie, sécheresse, le fleuve loire, le fleuve oder, le rhin, le fleuve colorado, vallée de l'euphrate, fleuve tigre, mésopotamie, la rivière verdon, bande dessinée, morris, lucky luke, en remontant le mississipi, journal le monde
vendredi, 02 septembre 2022
OH LA BELLE « MAISON QUI BRÛLE » (JA.CH.) !!!
Pendant que « nous regardons ailleurs » (Jacques Chirac, dans des temps déjà anciens), cela se passe en Californie et dans le journal Le Monde daté 28 juillet 2022.
Oh la bonne chaleur ! Oh le bon CO² !!! Oh les bonnes particules fines !!!
Mais on se dit que les Américains, ce n'est pas d'hier qu'ils connaissent les incendies, pardon, les méga-feux, même qu'ils les baptisent !
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ET SURTOUT BONNE RENTRÉE, HEIN !!! ET MÊME PAS PEUR, HEIN !!! ON A NOS COMBINAISONS D'AMIANTE (HÉ HÉ !) !!!
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lundi, 29 août 2022
OH LE BEAU LAC !!!
Cela se passe au lac de Castillon dans les Alpes-de-Haute-Provence et dans le journal Le Monde daté 14-15 juillet 2022.
Ceci était un lac. Oh la belle réserve d'eau douce (nous parlons de la bouteille d'eau minérale, bien sûr) !!!
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Ici, nous contemplons (de haut) l'état dans lequel se trouvait au 12 août le réservoir de Bouzey dans les Vosges (Le Monde 28-29 août 2022).
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ET SURTOUT BONNE RENTRÉE, HEIN !!!
09:00 Publié dans ECOLOGIE, L'ETAT DU MONDE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : réchauffement climatique, sécheresse, écologie, lac de castillon, réservoir bouzey, journal le monde, économiser l'eau
mercredi, 06 juillet 2022
LA REVUE DE DEUX MONDES ...
... PAS FAITS POUR SE RENCONTRER.
Photo prise le 4 juillet par Jean-Claude Coutausse : "Emmanuel Macron, entouré par les membres du nouveau gouvernement d'Elisabeth Borne, dans le parc du palais de l'Elysée". L'article de Claire Gatinois expose dans une analyse subtile tous les recoins des calculs et raisonnements du président pour préserver son équilibre mental (je plaisante, évidemment).
Photo prise le 22 juin par Bruno Amsellem, de l'agence "Divergence" : "Des membres de Solidarité Paysans s'entretiennent avec Annick et Didier (de dos), agriculteurs, dans la Loire, le 22 juin". L'article de Camille Bordenet nous fait toucher du doigt la dure et vraie réalité du métier de paysan (là, il est clair que je ne plaisante pas).
Deux articles parus dans le journal Le Monde daté "mercredi 6 juillet 2022".
Notez que c'est à la résidence du président de la République que la chorale gouvernementale vient poser pour la photo, et non à l'hôtel Matignon, résidence du Premier ministre, comme le voudrait la division du travail prévue par la Constitution de la Vème République. En toute logique, Elisabeth Borne devrait figurer au centre du groupe. Cela montre bien où Emmanuel Macron entend placer le vrai ressort du pouvoir. Je pose la question : "Qu'est-ce que ça change par rapport au premier quinquennat ?"
Rien. Cela veut dire que les agriculteurs continueront à se suicider doucement ; que les médecins des hôpitaux, en particulier psychiatriques, continueront à se taper la tête contre les murs à remplir des tableaux excel de centaines de codes cabalistiques inventés par des cabinets de conseils payés avec de l'argent public pour améliorer la rentabilité des services hospitaliers ; que l'école, le collège, le lycée et l'université français continueront leur irrésistible dérive vers un chaos de connaissances distribuées par un corps professoral de plus en plus déboussolé, médiocre et mal payé ; que la police continuera à éborgner à coups de LBD les ahuris qui auront la mauvaise idée de défiler dans la rue pour protester, avec ou sans gilet jaune sur le dos ; ... et puis toutes sortes d'autres choses aussi distrayantes que les Français sont sûrement avides de découvrir.
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samedi, 21 mai 2022
NOUS ET NOTRE EXOSQUELETTE
Dans cette mine d'or à ciel ouvert qu'est l'ouvrage en bande dessinée Le Monde sans fin, de Jean-Marc Jancovici et Christophe Blain (Dargaud, 2021), je me régale des trouvailles de l'ingénieur-pédagogue pour aider le lecteur à se faire une idée concrète des problèmes complexes qu'il expose, servi tant bien que mal par les dessins de son acolyte. Pour l'amener en quelque sorte à visualiser ce qui apparaîtrait foutrement abstrait à force d'aridité.
Par exemple, pour expliquer les pouvoirs extraordinaires dont l'innovation technique incessante a doté le moindre individu mâle ou femelle de l'époque actuelle, il a eu l'idée de les représenter dans la figure genre "Marvel Comics" d'IRON MAN, conçue comme un facteur démultiplicateur de la simple force musculaire individuelle : « Le parc de machines qui travaillent pour nous est une sorte d'exosquelette qui a la même force mécanique que si notre puissance musculaire était multipliée par 200 » (p.43). Il va de soi que, hors de cet exosquelette, nous nous affaisserions comme des bouses, comme des êtres chétifs et pitoyables perdus dans la nature hostile. Iron Man, en quelque sorte, nous permet de vivre dans une redoutable ILLUSION de puissance.
Je n'ai pas modifié le texte de la bulle : je l'ai juste bidouillé pour le rendre moins pénible à déchiffrer (un défaut du livre).
Iron Man — j'ajoute Iron Woman, parce que, pour les femmes, réputées musculairement moins avantagées, la chose est encore plus spectaculaire — peut tout, ou presque. Iron Man, c'est la personnification de l'ensemble des machines qui peuplent aujourd'hui le monde, et qui permettent d'une part de tout explorer, de tout exploiter, de tout fabriquer, de tout consommer, et d'autre part d'éviter aux individus qui en ont les moyens de « travailler à la sueur de leur front », de s'astreindre à des tâches rebutantes, fatigantes et jugées parfois dégradantes. Iron Man, c'est LE SYSTÈME machinique, industriel et, disons-le, capitaliste (tout à la fois abstraction anonyme et puissance concrète hégémonique), et c'est aussi l'innombrable masse des individus qui sont pris dans sa logique impériale et sont bien obligés de courber l'échine sous sa loi.
La contrepartie de cette toute-puissance, et qui a fini par faire sentir ses effets désagréables, puis nocifs, puis carrément délétères, c'est qu'Iron Man est un assoiffé pathologique, et qu'il faut lui injecter sans arrêt plus de pétrole si l'on ne veut pas qu'il cesse de fonctionner. L'ennemi d'Iron Man, c'est la panne sèche. Et la panne c'est notre angoisse, notre hantise et, peut-être bientôt, notre cauchemar : « Pourvu que rien ne vienne interrompre le flux énergétique qui nous alimente ! », nous disons-nous. « Pourvu que personne ne coupe le cordon ombilical par lequel nous arrive notre carburant vital ! »
Vous les voyez, tous les enjeux géopolitiques ? Vous les voyez, les pétroles de schiste du Texas ? Les sables bitumineux de l'Alberta ? L'oléoduc russe Northstream II ? Toutes les menaces qui pèsent déjà sur l'équilibre instable du monde ? Bon, on me dira qu'on sait tout ça. Certes, rétorquerai-je, mais Jancovici et Blain ajoutent à ce savoir déjà enregistré, catalogué, mémorisé, une incomparable force de persuasion par le détour de la narration et de l'illustration. Quant à savoir si ce savoir suscitera une action en retour, va savoir ...
Car Jean-Marc Jancovici se veut avant tout vulgarisateur. Mais attention, pas le petit tâcheron capable de bousiller toute une discipline en prétendant la mettre à la portée du vulgum pecus. Ici, on est dans la grande vulgarisation, la sérieuse, celle qui pèse de tout son poids sur la diffusion des données scientifiques les plus importantes dans les plus larges couches de la population. Ce livre qui fait peur s'est déjà vendu à plus de 250.000 exemplaires (chiffre donné dans M. le Magazine du Monde daté 19 mars 2022).
Je ne cesse d'apprendre ma leçon en revenant souvent à cette source de lucidité : plus ça va, moins je supporte les bonimenteurs, doreurs de pilules, beurreurs de tartines et autres passeurs de pommade et cireurs de grolles.
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans ECOLOGIE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : écologie, réchauffement climatique, bande dessinée, christophe blain, jean-marc jancovici, le monde sans fin, éditions dargaud, marvel, iron man, exosquelette, pétrole de schiste, sables bitumineux, journal le monde, m le magazine du monde
vendredi, 13 mai 2022
IL SE PASSE PEUT-ÊTRE QUELQUE CHOSE
Il n'y a pas que la cérémonie des Césars pour donner lieu à des scandales, avec ses brigades féministes menées par Adèle Haenel et Virginie Despentes à l'assaut de la citadelle machiste et patriarcale incarnée par la figure assurément démoniaque de Roman Polanski, qui est seulement — excusez-le — l'auteur de quelques chefs d'œuvre du cinéma.
Ici, ça se passe à la grande école d'ingénieurs AgroParisTech, qui s'appelait encore Agro quand Alain Robbe-Grillet en est sorti, et plus tard Michel Houellebecq. Les ingénieurs agronomes nouvellement promus se sont mis à huit pour cracher dans la soupe et remettre en cause le modèle industriel de notre agriculture dans son ensemble.
Ils récusent donc une agriculture industrielle, qui travaille avec ardeur à amoindrir la qualité des sols qu'elle cultive, jusqu'à les transformer, là où elle passe, en une simple matière parfaitement stérile, à la manière d'un certain Attila.
Titre tiré du Monde daté 29 avril 2022.
Titre tiré du Monde daté 12 mai 2022.
Bon, les grincheux diront que huit ingénieurs sur l'ensemble d'une promotion, ça reste modeste, et que l'industrie n'a pour l'instant rien à craindre de ce mini-soulèvement. Ce n'est pas faux. Ce n'est peut-être qu'une mince lézarde dans la muraille.
Mais on peut se dire aussi que la manifestation est susceptible de donner des idées à ceux qui viendront. Je me dis que s'il se produit quelques défections dans les rangs des futurs crânes d'œufs et autres responsables chargés de présider au destin de l'agriculture en France, c'est peut-être le signe que tout n'est pas encore joué ?
On a le droit de rêver, non ?
10:41 Publié dans ECOLOGIE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : agroparistech, journal le monde
dimanche, 08 mai 2022
EN AVRIL "LE MONDE" ENFONCE LE CLOU
Quelques titres du journal Le Monde picorés tout au long du mois d'avril, entrelardés de quelques illustrations (un peu bidouillées par mes soins) extraites de Le Monde sans fin, ce livre formidable et un peu agaçant de Jean-Marc Jancovici et Christophe Blain. Juste pour laisser entendre — avec ma subtilité légendaire ! — que l'humanité n'est pas sortie de l'auberge. Et on ne pourra pas dire qu'on ne savait pas que toutes les complaintes autour des espoirs de croissance entretenus par les responsables politiques, par les patronats unis dans la défense des intérêts des actionnaires nous entraînent tous dans une même catastrophe. Espoirs de croissance auxquels s'accrochent aussi les syndicats de travailleurs. Et même les travailleurs, les consommateurs, les contribuables, les automobilistes et les vacanciers (liste non exhaustive).
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Le Monde daté mercredi 6 avril.
Le G.I.E.C. ? "Vox clamans in deserto", si ça rappelle quelque chose à quelqu'un. Ce ne sont pas les scientifiques qui gouvernent. C'est sans doute heureux, parce que si c'était la rationalité pure qui était aux manettes, les classes politiques n'auraient pas le champ libre pour faire avec constance et détermination la preuve de leur médiocrité.
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Le Monde daté mercredi 6 avril.
Soit dit en passant, quand les populations concernées verront en direct ce que les responsables commencent à accepter de nommer "sobriété", c'est là qu'il comprendront leur douleur. Parce que c'est là qu'ils souffriront, et sans intermédiaire. Ceci pour dire que le terme de sobriété est un doux euphémisme. Mais que le fait qu'on le rencontre de plus en plus souvent veut dire que la mise en condition des esprits pour les accoutumer à la future réalité a bel et bien commencé. On mesurera l'avancée à la vitesse d'obsolescence des euphémismes, sous la pression des mots de vérité qui s'appliquent à notre réalité, actuelle ou à venir. Et puis un peu aussi sous la pression de la réalité elle-même, n'ayons pas peur de le dire. Les mots de vérité attendent en général pour surgir que le plus grande nombre ait le nez dans la bouse de la réalité, et qu'il ne soit plus possible alors de prendre de faux-fuyants.
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Le Monde daté samedi 9 avril.
Dennis Meadows est aujourd'hui âgé de 79 ans. Au sein du "réservoir de pensée" (think tank) suisse appelé Club de Rome, du Massachussets Institute of Technology (M.I.T.), il a participé à la rédaction du désormais prophétique rapport intitulé The Limits to Growth (Les limites à la Croissance), publié en 1972. Il y était dit que la planète étant de dimensions finies, les matières qu'elle était en mesure de nous procurer étaient elles-mêmes finies par nature. Et qu'il fallait envisager que la sacro-sainte croissance par laquelle jurent l'écrasante majorité des économistes connaîtrait forcément des ratés, avant de s'arrêter tout simplement. Cela fait donc cinquante ans qu'on a prévu ce qui se produit aujourd'hui. L'histoire montre qu'il ne sert à rien d'avoir raison avant tout le monde. Il n'y a pas, il n'y a jamais eu de prophètes.
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Le Monde daté jeudi 28 avril.
Est-ce que ça vous dirait de faire un petit tour dehors avec un thermomètre frisant les 50°C, comme on le voit en Inde et au Pakistan ? Là, comme l'explique François-Marie Bréon, physicien climatologue, au micro de Guillaume Erner (11 mai), il ne faut plus parler de "canicule", mais de FOUR.
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Le Monde daté vendredi 29 avril.
Ça, c'est ce qu'on doit à l'agriculture industrielle, forcée, du fait de ses méthodes, d'utiliser les moyens offerts par l'industrie chimique ("industrie agro-alimentaire", voilà encore un de ces doux euphémismes dont les empoisonneurs patentés ont le secret), un habit de soirée pour rendre présentable une famille de bandits, une mafia qui a ses entrées auprès des pouvoirs, au prétexte qu'elle seule détient les clés de la sacro-sainte croissance et du salut alimentaire de l'humanité.
Tiens, un truc amusant : l'I.N.R.A.E. vient de pondre un rapport très sérieux qui conclut que, en définitive, les pesticides employés dans l'agriculture sont mauvais pour la biodiversité, voire pour l'homme. J'adore ces gens qui découvrent l'eau tiède et qui font mine d'apprendre que les pesticides sont des poisons pour tout ce qui est vivant. Au surplus, je trouve curieux que des gens apparemment sérieux prennent la peine de faire la preuve scientifique de la nocivité et de la toxicité de substances expressément prévues pour avoir les effets qu'on leur connaît.
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Le Monde daté samedi 30 avril-lundi 2 mai.
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Le Monde daté samedi 30 avril-lundi 2 mai.
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Petit bonus.
Le Monde daté samedi 2 avril (titre à peine remaquetté).
J'ajoute ce titre, parce qu'il montre que, en plus de tous les facteurs de dégradation des conditions de l'existence humaine à la surface de la Terre, la guerre menée par Vladimir Poutine contre l'Ukraine peut avoir un magnifique effet de circonstance aggravante.
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mardi, 03 mai 2022
MATIÈRE A RÉFLEXION
Le prix des choses, et combien vaut un travailleur.
« Nous sommes revenus dans un monde de rareté. Nous avons un problème de ressources, d'énergie, de matières premières, de transport, de composants, et même d'emploi. A cela s'ajoutent les sanctions contre la Russie et la transition énergétique. La production mondiale de lithium doit être multipliée par 40 pour équiper nos véhicules électriques. Tout cela crée de l'inflation, comme à l'époque des années 1970-1990. Cela va conduire à une remontée des taux d'intérêt, qui imposera des contraintes budgétaires et donc la fin du "quoi qu'il en coûte". Cela change complètement l'action publique.
Si nous avions aujourd'hui une parfaite indexation des salaires sur les prix et une parfaite indexation des prix sur les coûts des entreprises, nous nous dirigerions vers 20 % d'inflation. Celle que nous avons en Europe aujourd'hui, qui n'est pas loin de 8 % n'est que l'effet mécanique des matières premières. Il n'y a eu aucun effet boule de neige. Le risque est donc devant nous. »
Nous deviendrons sobres, que nous le voulions ou non.
« La transition énergétique, c'est quatre points de PIB d'investissement en plus, un tiers pour décarboner l'énergie, un tiers pour décarboner l'industrie et un tiers pour rénover les logements. De plus, on détruit du capital. Un site qui passe à l'hydrogène investit en détruisant ses vieux fourneaux et en en achetant de nouveaux, sans produire plus. Si l'on veut investir quatre points de PIB, Il faut donc consommer quatre points de PIB de moins. Il n'y a pas le choix. La sobriété va s'imposer à nous. Il y a trois façons d'y parvenir : soit par le comportement, soit par les prix, soit par la fiscalité, parce que l'Etat lèvera des impôts pour financer les investissements qu'il doit effectuer pour la transition. Il va falloir que l'on consomme quatre points de moins pour faire de la place à l'investissement, que ce soit volontairement ou de force. »
Compétences, enseignement, formation.
« Le problème des compétences (le capital humain, les enfants, l'enseignement à l'école, la rémunération des enseignants, le lycée professionnel, la formation professionnelle) tire tous les autres : celui de l'emploi — 67 % des Français en âge de travailler ont un emploi contre 80 % de Suédois. Celui de l'industrie — 70 % des écarts du poids de l'industrie dans les pays de l'OCDE s'expliquent par les compétences de la population. Celui des comptes publics — on a peu d'emplois, donc de recettes fiscales, du fait du chômage. Les dépenses de l'Etat sont liées à la population, les recettes à l'emploi. Les pays comme la France qui ont peu d'emplois ont structurellement un problème fiscal. »
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Voilà. Ce sont les propos tenus au Club de l'économie du Monde le 28 avril (voir le journal Le Monde daté 30 avril) par l'un des quatre invités, monsieur Patrick Artus, les autres invités étant Jérôme Fourquet, Pascale Coton et Geoffroy Roux de Bézieux. Mine de rien, Artus délivre quelques informations significatives. C'est en général ce que j'apprécie dans ses interventions : ni rêveur, ni doctrinaire, ni conceptuel. Avec lui, on est dans le concret : non seulement il maîtrise la théorie économique, mais il en propose une analyse des effets que celle-ci entraîne dans la réalité.
Des propos qui méritent qu'on y réfléchisse, en particulier le paragraphe qui concerne l'éducation et la formation (et en bout de course, les compétences) : selon moi, ce que la société investit dans l'enseignement et la formation reflète exactement l'ambition que cette société a de s'élever au-dessus d'elle-même. A cet égard, mon diagnostic est assez noir pour que je refuse d'en faire état ici.
Pour la sobriété, ceux qui suivent les travaux de Jean-Marc Jancovici sont déjà au courant. Le mot "sobriété" est d'ailleurs sans doute un euphémisme, pour désigner le sort qui attend tous ceux qui, aujourd'hui, bénéficient d'un minimum de confort électrique, d'agréments domestiques et de diverses facilités motorisées — confort, agréments et facilités qu'il faudrait plutôt appeler luxe, pour faire la différence avec ceux qui en sont dépourvus. Ou je me trompe, ou la sobriété qui sera celle de l'humanité dans des temps à venir peut-être pas si lointains ressemblera fort à la rudesse des conditions de vie qui fut celle de nos ancêtres.
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jeudi, 31 mars 2022
JEAN-MARC JANCOVICI, VULGARISATEUR D'ALERTE
Jean-Marc Jancovici commence à être célèbre. La preuve, c'est qu'il a fait la couverture de M, le magazine hebdomadaire du journal Le Monde. Un truc tellement bourré de publicité pour des marques de luxe, de photos pour des vêtements ou des accessoires de luxe et de personnages de luxe que j'ai tendance à me réfugier sur l'îlot désert des mots croisés. Je pioche dans ce magazine insupportable, de temps en temps, telle ou telle recette de cuisine pas trop compliquée, mais je laisse royalement à qui s'y intéresse le sudoku. Pour une fois, à cause de ce personnage singulier à la tête a priori bien sympathique, le magazine a bénéficié d'un sursis avant de disparaître dans la poubelle papier.
Jean-Marc Jancovici, on peut aussi dire qu'il est d'ores et déjà célèbre à cause de la Bande Dessinée dont il est l'un des deux auteurs, avec Christophe Blain, qui s'est paraît-il vendue à ce jour à plus de 250.000 exemplaires. Je me dis que ça permet de voir venir l'avenir personnel avec une sérénité certaine, et de conforter certaines thèses défendues depuis longtemps, au début dans le désert, à présent devant un public tant soit peu plus nombreux. Le seul et unique combat de Jancovici ? Le réchauffement climatique. Son truc à lui ? Faire parvenir l'urgence climatique à la comprenette du plus grand nombre.
Un mot pour se faire une idée de qui est Jean-Marc Jancovici ? UNE TRONCHE, et majuscule ! Bien faite et bien pleine ! Et dedans ça fonctionne à vitesse accélérée. Pour m'en rendre compte, je n'ai eu qu'à visionner un ou deux Youtubes : non seulement il parle sans notes, mais en plus il vous balance par camions entiers les informations, les chiffres, les faits, les données, les comparaisons audacieuses et parlantes. Bref, il attaque à toute allure votre propre cerveau de tous les côtés à la fois. Je l'avoue : j'ai eu un peu de mal à suivre. Il me faudrait des vidéos passées au ralenti pour enregistrer, pour prendre le temps d'assimiler, pour bien comprendre.
C'est la raison pour laquelle la B.D. Le Monde sans fin, (Dargaud, 2021) réalisée avec Christophe Blain, me convient à merveille. Ben oui, le livre va à la vitesse que vous voulez, pas besoin de sortir toutes les banalités bien connues à ce sujet. Là, je suis plus à l'aise, plus libre de mes mouvements et de mes choix. Je picore. Par exemple, j'apprends que Jancovici est l'inventeur en 2000 du concept de "Bilan Carbone", devenu depuis, non seulement une évidence, mais la « norme mondiale pour compter les émissions de gaz à effet de serre des entreprises » (p.8). Pour ce qui est de l'imagination créatrice, Jancovici ne craint personne. Son obsession, c'est de quantifier.
Si j'ai un peu de mal à entrevoir toutes les significations et implications de la grande "Loi de Conservation" (« A l'intérieur d'un système qui ne communique pas avec l'extérieur, on ne peut ni créer, ni détruire de l'énergie », p.19), ça va beaucoup mieux lorsque l'ingénieur explique à son interlocuteur qu'il n'y a pas d'énergie propre en soi et que tout dépend de la quantité consommée.
Ça me rappelle la double page "Les Riches et les Pauvres" de Reiser : quand les riches étaient seuls à se droguer, c'était exotique et ça avait de la classe ; quand les pauvres se droguent, ça devient un désastre social. Ben oui, il y a beaucoup plus de pauvres que de riches. De même, tant que le pillage des ressources naturelles était le fait d'une minorité (occidentale) qui avait pris goût à l'abondance, au confort et aux facilités de la vie, le "Système Terre" pouvait supporter ; mais dès que la Chine, l'Inde et autres pays autrefois sous-développés se sont mis dans le crâne l'idée de faire de même, c'est la catastrophe. S'il prend à tous les humains l'envie de vivre comme les Américains, ça revient à programmer la fin du monde humain.
Pour l'heure, je retiens surtout que tout le problème du réchauffement climatique tourne autour de notre voracité énergétique absolument incommensurable à nos seules petites capacités physiques personnelles, une voracité qui nous a rendus dépendants de toutes sortes de machines gourmandes, soit de façon directe (auto, lave-linge, smartphone, etc.), soit de façon indirecte (notre système d'alimentation en eau, gaz, électricité, d'enlèvement des ordures ménagères, etc.).
Je retiens que toute énergie devient SALE dès lors qu'elle est consommée, non plus par trois pelés un tondu, mais par des milliards d'humains semblables à nous.
Je retiens que, grâce aux machines que la technique et ses innovations ont mis à notre disposition, c'est comme si chacun d'entre nous disposait de DEUX CENTS ESCLAVES (200) prêts à nous servir à tout instant. C'est une moyenne mondiale. En ce qui concerne la France, le chiffre se situe plutôt autour de 600.
Je retiens que si l'on détruisait TOUTES les machines présentes sur Terre, il faudrait que l'humanité compte MILLE QUATRE CENTS MILLIARDS (200 x 7 milliards) d'individus pour abattre une besogne équivalente. Ce qui signifie, soit dit en passant, que ce sont en réalité, à l'heure où j'écris, 1.400 milliards d'équivalents-humains qui croquent dans la planète avec leurs grandes dents. Est-ce que c'est assez parlant, à votre avis ?
Voilà le talent de Jean-Marc Jancovici : il quantifie, il mesure. Et il compare les ordres de grandeur. Et il traduit en images parlantes le résultat de ses comparaisons. J'ajoute que Christophe Blain a le dessin modeste et efficace, et qu'il met celui-ci entièrement au service du propos.
Le Monde sans fin : un livre excellent.
Voilà ce que je dis, moi.
samedi, 26 mars 2022
PAS DE "GRAND REMPLACEMENT", MAIS ...
... MAIS UN ISLAM CONQUÉRANT, PATIENT, RAMPANT, OBSTINÉ.
1 - Un remplacement a déjà eu lieu.
Je le dis d'entrée de jeu : les gens qui affirment, de façon sincère ou non, redouter le grand remplacement de la population française "de souche" par des hordes venues du Maghreb, d'Afrique noire ou du Proche ou Moyen Orient, se laissent leurrer par des fantasmes ou des mensonges. De toute façon, ma conviction est faite depuis longtemps : la seconde moitié du XXème siècle a déjà vu l'ancienne population française se laisser remplacer, année après année, par ses libérateurs de 1945.
Régis Debray, dans son livre Civilisation (Gallimard, 2017), raconte de façon lumineuse et probante « comment nous sommes devenus américains » (le sous-titre, c'est moi qui souligne). De son côté, Jean-Pierre Le Goff, en racontant dans le détail le quotidien de la France qu'il a connue de 1950 à 1968 (La France d'hier, Stock, 2018), dessine les traits d'un pays que la plupart des Français d'aujourd'hui qualifieraient d'épouvantablement ringarde, obsolète, rétrograde, presque archéologique.
Moyennant quoi, ils refusent d'admettre que la France, si elle garde malgré tout des traces de ce qu'elle fut en d'autres temps, a laissé plus ou moins joyeusement, plus ou moins consciemment, remplacer ses décors, son habitat, sa culture, ses traditions, ses façons d'être et de faire, sa psychologie et jusqu'à son âme, par les innombrables biens matériels et culturels venus des Etats-Unis. La France est devenue une cliente. Certains disent même un protectorat (mais ils exagèrent sûrement). Les Français sont quasiment gallo-américains, diraient Goscinny et Uderzo dans Le Combat des chefs.
Au point que, dès qu'une innovation plus ou moins innovante (je ricane), plus ou moins "historique" (je pouffe), plus ou moins "révolutionnaire" (je me gausse) pointe le bout de l'oreille sur le sol américain, nos chers journalistes, toujours prêts à gober la moindre "nouveauté", saluent avec enthousiasme son prochain débarquement en Normandie, je veux dire sur notre sol, allant même parfois jusqu'à préciser que la France, toujours à la remorque du navire amiral d'outre-Atlantique, n'est-ce pas, est en retard de dix ans sur les Etats-Unis. Au point que personne n'a oublié le cri du cœur de Jean-Marie Colombani paru en éditorial de "une" du journal Le Monde au lendemain du 11 septembre 2001 : « Nous sommes tous Américains ».
Remarquez qu'en 2003, le refus radical de Jacques Chirac et Dominique de Villepin d'entrer dans la coalition américaine (illégale) pour démolir le régime de Saddam Hussein, tend à prouver que nous n'étions pas si américains que ça. Et les journaux et médias américains ont alors si abondamment craché sur la France que cela a pu réconforter ceux qui avaient un reste de fierté nationale, sans forcément leur ouvrir les yeux sur la réalité ou la profondeur de l' "amitié" que nous portent les Américains.
Malheureusement, c'était juste un sursaut de fierté de la part de quelques attardés du gaullisme. La France vassale a vite repris ses droits. Nicolas Sarkozy (aah, ses footings avec les T-shirts floqués NYPD !) a même réintégré la France dans le commandement de l'OTAN (officine largement dominée par le suzerain américain), et sans contrepartie. En chemise et la corde au cou, pour ainsi dire.
Et tout aussi malheureusement, nous sommes devenus assez Américains pour que j'en veuille énormément à certains Français d'avoir importé des modes de pensée propres aux Etats-Uniens, à commencer par cette arrogance dans l'affirmation de l'identité (les "fiertés" qu'on fait défiler), qui fait d'une petite collection de "minorités" (raciales, sexuelles, religieuses, etc.) des prescripteurs de lois.
Ces minorités n'hésitent pas à calquer benoîtement sur la situation spécifiquement française (données historiques comprises) les problématiques particulières propres aux Américains. Ces minorités haïssent la liberté d'expression quand elle froisse si peu que ce soit l'épiderme de leur sensibilité, au prétexte qu'elles se sentent victimes de l' "oppression majoritaire" et des "stéréotypes" dominants, et ne pensent qu'à une chose : faire taire l'ennemi, et punir, punir, punir. Il faut ensuite être un mouton aveugle et sourd pour continuer à bêler sur le "vivre-ensemble" ou sur le "faire-société".
Bon, tout ça pour dire que le "grand remplacement" est un fait accompli depuis lurette : les Américains, appuyés sur leur "soft power" (cinéma, musique, etc.), ont fait en sorte que la France change de peuple. C'est une chose acquise, il n'y a plus beaucoup d'âme française chez les Français. Le Français d'aujourd'hui se sent très bien dans les oripeaux que lui a vendus l'Amérique, et va même jusqu'à qualifier d' "anti-Américains" tous ceux qui "crachent" dans la soupe.
Ceux qui s'intitulent "français de souche" devraient y réfléchir, car dans le tas des idées importées des USA, il en est une qui pourrait au moins susciter des interrogations : c'est le melting pot, ce "brassage et assimilation d'éléments démographiques divers, en partic. aux Etats-Unis, au XIXème siècle" (Larousse P.L.I. 2002). Pourquoi la France n'aurait-elle pas aussi importé cette magnifique innovation ? Pourquoi la France ne deviendrait-elle pas à son tour un gros tas de chouettes peuplades juxtaposées ? Pourquoi n'adopterait-elle pas pour étendard le drapeau arc-en-ciel des fiertés mondialisées ?
2 - Pas de "Grand Remplacement", mais une offensive opiniâtre et tranquille.
Je ne sais donc pas trop si ces Français de souche, qui pestent parfois violemment et de façon indiscriminée contre l'immigration, ont tort ou raison quand ils hurlent au "grand remplacement". Ce dont je suis sûr, c'est qu'ils devraient prêter davantage d'attention à un phénomène si discret qu'il passe largement au-dessous des radars de la vigilance ordinaire : le combat culturel mené au quotidien par un certain nombre d'activistes musulmans, en particulier des imams, pour se concilier, puis s'approprier l'esprit de tout un tas d'individus peu instruits, peu méfiants ou peu regardants. Car ces activistes sont assez habiles pour éviter de mettre en avant le djihad, la violence ou la guerre aux "croisés" de la chrétienté. On a à faire à des imams souriants et bienveillants : nulle trace d'hostilité déclarée dans leurs paroles et leurs attitudes.
En témoigne un homme qui fut d'abord un réfugié syrien admis sur notre sol. Omar Youssef Souleimane est un poète et un écrivain. Il est né dans une famille rigoureusement salafiste, le père, surtout. Aujourd'hui, il est Français depuis trois mois, et il vient d'écrire Une Chambre en exil (Flammarion). Il était l'invité de Marc Weitzman dans son émission "Signes des temps", sur la chaîne France Culture, dimanche 20 mars, pour en parler un peu.
Mon intention ici n'est pas de rapporter ses propos dans le détail. Je veux seulement relever quelques idées cruciales qui nous concernent, nous, qui nous sentons avant tout Français, Européens et de culture complexe à dominante chrétienne écrasante, quoique déclinante. Son aventure a commencé en 2012, lorsque, en compagnie d'une vingtaine d'autres "rêveurs" (c'est lui qui le dit), il a manifesté à Damas pour la liberté. Alors que six d'entre eux étaient arrêtés pour subir les traitements qu'on imagine, il a réussi à échapper aux sbires de Bachar al Assad.
Il raconte qu'il a été sauvé par la poésie, en particulier celle de Paul Eluard, mais aussi par la "vieille" poésie arabe, qui lui inspire cette belle pensée que la langue arabe, qui date de bien avant l'islam (Vème siècle ?), recèle des richesses infiniment plus vastes que la langue du Coran qui, quant à elle, a été figée autour du XIème siècle (ça fait quand même 1.000 ans) en tant que langue sacrée et à ce titre intouchable. Le rigorisme qui s'est alors abattu sur la langue des Arabes a empêché celle-ci d'évoluer avec le temps.
L'interlocuteur de Weitzman se désole alors à l'idée que beaucoup de ceux qui veulent apprendre l'arabe aujourd'hui, ne le font que pour lire le Coran dans le texte. J'ajoute que si le programme des écoles coraniques consiste vraiment à faire apprendre par cœur le texte du Coran, il y a du mouron à se faire sur le niveau de la culture ainsi transmise et sur la future ouverture d'esprit des élèves.
Omar Youssef Souleimane raconte comment, arrivé en tant que réfugié à Bobigny, il a fait la rencontre d'un imam redoutable, non parce qu'il portait un poignard, ni parce qu'il voulait exterminer les maudits "koufars", mais parce qu'il montrait un visage "doux, intelligent, sympathique, intellectuel" (ce sont ses mots). Cette stratégie enveloppante et insinuante lui fait dire que ce genre de personnage est beaucoup plus dangereux pour la France à long terme que n'importe quel djihadiste ou terroriste. Et surtout il sait que ce genre d'imam n'est pas un cas isolé, mais qu'il a tendance à pulluler dans les cités de Seine-Saint-Denis et d'ailleurs, là où les musulmans sont nombreux, et parfois ultra-majoritaires. Il ajoute que ces imams sont bien rémunérés (par l'Arabie saoudite ou la Turquie). Cool Raoul ! A l'aise, Blaise ! Facile Mimile !
Selon lui, ce qui se prépare dans ces "territoires perdus de la République" (titre d'un bouquin bien inspiré), c'est une "France séparée", n'en déplaise à une certaine extrême gauche, prompte à lancer ses glapissements antiracistes dès que quelqu'un tente d'alerter sur les dangers de l'offensive islamique tranquille à l'œuvre depuis quelques décennies. Une extrême-gauche qui sort à tout bout de champ ses refrains, du risque de "récupération par l'extrême droite" à la "discrimination". Selon Souleimane, le voile soi-disant islamique est avant tout un drapeau identitaire, car pour ces imams, aussi étonnant que cela puisse paraître, l'islam est moins une religion qu'une identité : l'identité d'une communauté. Et une communauté fermée sur elle-même.
Le plus terrible dans cette affaire, c'est l'incroyable complicité de certains politiciens français qui, pour de simples raisons électoralistes, se mettent cul et chemise avec ces responsables religieux. Certes des gens qui leur font peur, mais dont ils ont un besoin vital, pour une excellente raison : l'influence décisive que leur parole possède sur la communauté dont ils sont la voix. On voit, dit Souleimane, dans certaines municipalités (Bobigny ?), des imams assister à des réunions avec des édiles qui tiennent par-dessus tout à rester en bons termes avec eux et tremblent à l'idée de se les mettre à dos. Et, continue Omar Youssef Souleimane, la police laisse faire l'imam qui tolère le dealer de drogue, au motif qu'ainsi l'ordre règne. Et le maire se frotte les mains, parce qu'il pense que son mandat suivant est déjà dans la poche. Comprendre : "dans la poche de l'imam", bien sûr.
Bien entendu, quand il est dans son cercle de proches, l'imam ne cache rien de son véritable objectif final : instaurer la charia. Face au bon peuple, le discours malin, enjôleur et manipulateur ; face aux initiés, la vérité des intentions.
Pour conclure, on ne peut évidemment pas effacer un demi-siècle de remplacement de ce qui fut autrefois les valeurs des Français par les "valeurs" spectaculaires et marchandes de nos "amis" américains, mais qu'on y réfléchisse bien : cette transformation a été obtenue en prenant son temps, par la douceur et sans violence, avec le consentement parfois enthousiaste des Français, à commencer par leurs élites. Pourquoi la même patience, la même douceur et la même non-violence n'obtiendraient-elles pas le même résultat, mais cette fois en faveur de l'islam ?
Pendant que toute l'opinion publique et toute la vigilance officielle et officieuse (D.G.S.I.) ont les yeux et les micros braqués sur les événements sanglants, d'autres activistes mènent une offensive d'autant plus subtile, discrète et silencieuse qu'elle est souriante et pacifique. Je dirais presque que les attentats, vus de cette manière, font office de diversions (que les victimes veuillent bien pardonner cette audace de langage) par rapport à l'objectif final.
Il faudrait que les hautes autorités politiques et les pouvoirs municipaux des communes concernées réfléchissent à leur lourde responsabilité dans les progrès accomplis par l'islam "normal" sur le territoire français. Oui, je sais : "il faudrait", ... Mais ne sont-ils pas trop lâches pour cela ? Que ne ferait-on pas pour garder son fauteuil ?
Je récuse quant à moi la différence que certaines bonnes âmes s'obstinent à faire en "islamique" et "islamiste". C'est une question de civilisation.
Voilà ce que je dis, moi.
Note : Pour ceux qui voudraient savoir un peu mieux à quel adversaire ils ont à faire, je conseille la lecture d'un livre tout à la fois délicieux à la lecture et redoutable à la réflexion, qui permet de pénétrer dans une certaine mesure dans ce qui fait l'esprit de la civilisation des Arabes. Ce livre, c'est Le Livre des Ruses, collection d'anecdotes plus ou moins conséquentes, mais toujours spirituelles, une collection qui aide à comprendre pourquoi les Arabes (les musulmans ?) ont longtemps été considérés en Occident comme des êtres fourbes et sans parole.
J'ai longtemps tiré de la lecture de ce livre la conviction que si l'Occident médiéval se méfiait de la lettre, il accordait un grand prix à la parole donnée et que, inversement, les Arabes utilisaient les subtilités du verbe pour tromper l'ennemi, ce qui revient à prendre l'adversaire à son propre piège : ce n'est pas mentir que de prononcer des paroles subtiles qui bernent l'attention d'un autrui trop confiant dans une hypothétique similitude des façons de penser, pour mieux pouvoir lui renvoyer, s'il proteste contre la mauvaise foi de la personne, l'exactitude des paroles prononcées.
Et ce n'est qu'une des milles facettes de cet art du langage développé au fil des pages de cet ouvrage tout à fait étonnant. La différence des civilisations arabe et européenne me semble résider là, au creux de la parole : chez nous la ligne droite de la parole donnée (oui, je sais, "les écrits restent" etc., mais), qui fait apparaître comme une félonie la moindre infraction à la loyauté ; chez eux l'admiration qui s'adresse à celui qui, à force d'habileté et de subtilité langagière, a réussi à embrouiller la raison de l'homme à circonvenir.
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Il faut les voir s'embrasser, se congratuler, sauter de joie, les moukères de Grenoble, à l'annonce de la décision qui autorise (en termes alambiqués) le burkini comme tenue pour les ébats aquatiques en territoire municipal. « ON A GAGNÉ !!! », ont-elles triomphé. Et maintenant qu'elles ont gagné à Grenoble, les associations d'activistes musulmans comptent bien ne pas s'arrêter là, et faire tout ce qui est en leur possible pour accrocher de plus gros gibiers à leur tableau de chasse. L'objectif ? Très simple : grignoter, mètre après mètre, le terrain occupé par l'adversaire en se servant des moyens mêmes offerts par ce dernier. Leur horizon ? Faire avancer, mètre après mètre, la cause de l'islam sur des terres qui ne sont presque plus chrétiennes jusqu'à occuper tout le terrain (ajouté le 19 mai).
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mercredi, 16 mars 2022
LA SERVITUDE ÉLECTRIQUE
Impressions de lecture.
Je viens de refermer (7 mars) La Servitude électrique, de Gérard Dubey et Alain Gras (Seuil, 2021). Le premier est sociologue, le second est socio-anthropologue — je passe sur les détails additionnels. Ceux qui suivent un peu ce blog doivent se demander ce qui m'a pris, sachant la couleur souvent désobligeante des propos que je tiens sur les "sciences" humaines en général, et en particulier sur les "spécialistes" et autres "experts" patentés qui pondent à tour de bras ouvrages savants ou articles de revues "scientifiques", interventions décisives dans les pages "débats" ou "idées" du journal Le Monde, qui en est friand, voire gourmand.
Certains sont même invités plus souvent qu'à leur tour à venir postillonner doctement les microbes de leurs "sciences" dans les micros de la radio ou de la télévision, dans le but éminemment vertueux (défense de rire) de nous aider à comprendre ce qui se passe de par le vaste monde et jusqu'aux tréfonds intimes de nos chaumières. Autant le déclarer d'entrée de jeu, ce n'est pas le livre de Dubey et Gras qui me fera changer d'avis.
C'est le titre du livre (La Servitude électrique) qui a déclenché mon geste d'achat, en ce qu'il laisse entrevoir tous les malheurs qui s'abattent sur les pauvres humains quand ils sont privés d'électricité. Il me suffit de penser aux Ukrainiens de Marioupol ou d'Irpin qui, sous les bombardements de leurs cousins russes, sont coupés de toute ressource en eau, gaz et électricité depuis x semaines. On peut aussi avoir une pensée pour les habitants de Sarajevo, qui furent privés de presque tout lorsque Slobodan Milosevic a lâché ses chiens de guerre sur la Croatie et la Bosnie pour réaliser son rêve de "Grande Serbie".
La question est : « Que deviendrions-nous, si toute ressource électrique nous était un jour coupée ? » (il faudra peut-être mettre le verbe au futur). La réponse à cette question est évidente : « Nous retournerions deux siècles en arrière, mais démunis de tous les savoir-faire, gestes, habitudes qui semblaient naturels à nos ancêtres ! Et surtout les savoir-faire qui constituaient l'essentiel des apprentissages concrets (= ni scolaires, ni intellectuels, ni culturels, etc.) qui permettaient à chacun de se débrouiller dans son environnement et dans sa réalité ». Vu d'ici, ça voudrait dire retour à la préhistoire, chaos, catastrophe, désastre, etc. Et sans doute barbarie.
Car l'usage constant d'appareils mus par des moteurs et/ou par l'électricité nous a désappris les savoirs fondamentaux qui ont fabriqué toutes les cultures humaines depuis des dizaines de siècles. C'est la raison pour laquelle j'avais trouvé le titre de Dubey et Gras particulièrement bien venu, tant il est vrai que l'électricité figure au premier plan parmi les piliers de ce qu'on appelle le "Développement" ou la "Modernité".
C'est ce qu'avait bien vu le camarade Lénine qui, dans son discours au huitième Congrès des Soviets en 1919, a lancé le slogan : « Le socialisme, c'est les Soviets plus l'électricité », qui n'est pas pour rien dans le dévoiement de l'idéal communiste en capitalisme d'Etat, avec l'aristocratie d'une Nomenklatura de privilégiés qui n'ont eu aucun mal à se reconvertir en "oligarques" quand on a vu se démembrer l'empire soviétique.
Chez nous, aujourd'hui, c'est un constat d'une telle banalité que je ne m'y attarde pas : la force de l'électricité est partout présente, dans la vie quotidienne de tout le monde, mais aussi à la base de toute la machine économique comme aux origines de nos moyens actuels de communication. Imagine-t-on même un meeting politique sans micros ni haut-parleurs ?
Bon, pas besoin d'un long prêche : tout le monde est convaincu du désastre absolu qui s'abattrait sur la civilisation entière si la source électrique venait à se tarir, une civilisation dont la puissance n'a pas d'égale historique, une civilisation fertile en inventions de toutes sortes, une civilisation qui s'est rendue capable de rendre la vie humaine plus facile, plus agréable, plus longue, plus confortable, plus ..., plus ....
Mais une civilisation qui a déposé toute son existence physique, voire toute son âme, entre les mains de cette "fée". Mais une civilisation d'une fragilité extrême, toujours à la merci d'une panne, d'un accident, d'une tempête, que sais-je encore. Mais une civilisation qui s'est en quelque sorte elle-même réduite en esclavage, puisqu'en tout et pour tout elle s'est mise dans la dépendance la plus étroite d'une puissance qui lui échappe en partie, puisque l'on n'a pas encore trouvé le moyen de bâtir des greniers où l'on stockerait l'électricité de la même manière que le foin, le blé, etc.
J'ai donc acheté La Servitude électrique, me fiant à la clarté séduisante du titre, et m'attendant à découvrir des développements d'idées profondes sur le sujet. J'ai déchanté. Pour faire simple, je dirai, pour donner au lecteur éventuel une idée de l'impression générale que m'a laissée le bouquin : « Pourquoi faire simple quand on veut faire compliqué ? ». Je ne doute pas de la compétence des deux auteurs dans leur spécialité et dans leur démarche, et peut-être ont-ils voulu donner à leur travail le cachet de sérieux universitaire qui fait estimer des égaux et collègues.
En lisant des ouvrages de spécialistes de telle ou telle "science humaine", j’ai trop souvent l’impression que les auteurs se paient de mots. Je veux dire que trop souvent le discours des sciences humaines ressemble au nom de famille de l’O.S.S.117 de Jean Bruce (qui reste l'inventeur du personnage) : « Bonisseur de la Bath », autrement dit, en bon argot de l'époque, « doué pour le bagou infatigable du camelot bavard ». Et je dois l’avouer : je ne supporte plus.
Mais pourquoi diable leur manière d'aborder et de traiter le sujet m'a-t-elle souvent horripilé ? J'avoue que je ne suis pas encore parvenu à répondre à cette question de façon satisfaisante. Il faudra que je relise leur bouquin quand j'aurai assez de courage. D'accord, je ne suis pas spécialiste de la question, mais il ne me semble pas que les éditions du Seuil, en créant leur collection "Anthropocène", aient eu l'intention de s'adresser aux seuls savants.
Et si je ne nie pas que le sujet du livre réclame l'exposé de considérations techniques, je n'en démords pas : rien n'oblige l'économiste, le philosophe, le psychanalyste, le sociologue, bref, le science-humaniste, qu'il soit de base ou d'élite, à user d'un langage amphigourique, voire inintelligible, pour diffuser le fruit de ses réflexions. Il est vrai que les auteurs ne jargonnent pas constamment. Comment dire ? Peut-être compliquent-ils les choses dans leur façon de disposer les idées et de recourir à des concepts, car à plusieurs reprises, je me suis demandé pourquoi ils se mettaient à parler de ceci, de cela.
Et pourtant, ça ne commence pas trop mal : « Nous vivons de l'électricité comme de l'air qu'on respire, sans nous poser de questions, ni mesurer les conditions et le prix de ce confort. D'où l'incompréhension, puis l'impatience lorsque la panne interrompt brusquement le cours normal des choses mais aussi l'angoisse qui saisit les penseurs du capitalisme, autant que les simples citoyens, d'un risque dont on ne connaît pas la taille » (p.8). Tout le monde est d'accord, n'est-ce pas, bien que je me demande ce que viennent faire ici les "penseurs du capitalisme" : s'agissant de panne, j'attendrais plutôt les "entrepreneurs" (les penseurs ne sont jamais en panne, qu'on se le dise). Mais passons.
Passons aussi sur "le célèbre William Jevons" dont la "célébrité", en dehors d'un cercle d'initiés, m'a bien fait rire (comment ? vous ne connaissez pas William Jevons ?). Je suis d'accord avec « le qualificatif de thermo-industrielle » (p.12) pour désigner notre civilisation, avec le « macro-système technique » (p.12 ; quoique, franchement, M.S.T. !......), avec le fait que « La course aux énergies renouvelables confie à l'électricité le soin de sauver le monde » (p.15) et avec le caractère illusoire et fragile du sentiment de confort et de sécurité que procure la possibilité d'appuyer sur des boutons pour obliger mille esclaves mécaniques à exécuter des tâches qui nous répugnent, ou pire : dont nous avons perdu le savoir-faire antique.
D'accord encore pour admettre que cette puissance n'est pas sans contreparties et conséquences désagréables. Je les appellerais "externalités négatives", si messieurs les économistes m'y autorisent : avec cette précision que l'énergie qui allume nos lampes et anime nos lave-linge est produite très loin de son lieu d'utilisation. Elle est donc invisible aux yeux de l'usager. Et même quand on regarde les tours de refroidissement de la centrale du Bugey depuis l'esplanade du Gros-Caillou, on ne fait pas le lien avec le four électrique où mijotent le gratin dauphinois et le rosbif qui nous attendent pour le repas de midi. Pareil pour la centrale au charbon ou au pétrole.
Allez, d'accord aussi sur la pile de Volta (inventée autour des années 1800). C'est tout à fait étonnant, mais, depuis Volta, aucune invention décisive n'est venue modifier les données de base du problème que pose le stockage de l'électricité. Certes on a amélioré la conception, on a trouvé des composants de plus en plus performants, mais comme je l'ai dit plus haut, on n'a pas trouvé le grenier capable de tenir à notre libre disposition le flux électrique. Comme le disent les auteurs de La Servitude électrique : « Ce sont seulement des aménagements sur les substances en jeu, métaux et électrolytes, qui marquent le développement de l'objet technique. La philosophie des sciences constaterait tout simplement une invariance du paradigme [c’est moi qui souligne] » (p.100). "Invariance du paradigme", bon dieu, mais c'est bien sûr ! J'ai trouvé où le fleuve Jargon prend sa source !
Soyons juste : certains passages du livre apportent de véritables informations cruciales, tout au moins aux yeux du lecteur moyennement informé que je suis. On trouve ça page 164, où l'on parle d'éoliennes de 200 m. de haut (en mer). C'est d'abord une citation : « Les terres rares interviennent dans la composition des générateurs dits "synchrones" dans lesquels le rotor est un aimant permanent. Ainsi, pour une puissance de 1 MW fournie par le générateur, il faut environ 600 kg d'aimants contenant près de 200 kg de terres rares. Une éolienne offshore pouvant atteindre 10 MW de puissance nécessite donc à elle seule plus d'une tonne de terres rares » (p.164). C'est dans un rapport officiel. Je ne sais pas vous, mais je trouve que ça jette un sacré froid sur les éoliennes, non ?
D'autant que les auteurs ajoutent : « L'adjectif "rare" indique leur infime présence au milieu d'autres minerais, par exemple "seulement" 16 tonnes de roche pour un kilo de césium, mais 1200 tonnes pour un kilo de lutécium, tout cela pour nos écrans LCD, lampes LED, batteries, etc., et intermédiaires électroniques en général » (p.164-165). Ben voilà, c'est pas difficile, elle est là, messieurs Dubey et Gras, la substance qu'il me faut : ça au moins c'est du solide, qui m'autorise à penser qu'on n'est pas près de voir la fin de l'extractivisme. Avis aux amateurs d'Iphones, de smartphones et autre 5G. Qu’attendent les jeunes qui s’empressent aux manifs "climat" pour piétiner sauvagement leurs propres Iphones ?
Dommage que, quelques pages plus loin, on trouve cette salade : « L'éolien et le solaire, en effet, mettent en pleine lumière le dilemme du choix à faire librement entre beauté et utilité. La première est certes construite mais habitée philosophiquement par la controverse, elle n'est pas mesurable, alors que la seconde est socialement définie à un moment donné par la parole dominante » (p.180). Faut-y vous l'envelopper, Madame Michu ? Vous comprenez mieux ma réticence ?
J'ai ensuite un peu de mal à suivre les considérations et les chaînes de raisonnement qui accompagnent l' « encapsulage » dû au numérique, si ce n'est l'idée que le dit numérique achève de nous couper de la réalité réelle des choses et des gens, ainsi que quelques émergences : « Le pouvoir introuvable de la cybernétique est surtout le symptôme d'un pouvoir qui se rend invisible à mesure qu'il se privatise et se sépare de la société » (p.247). Ce que je comprends ici, c'est que les pouvoirs, que ce soient les autorités publiques ou des instances privées, s'ils ne comprennent pas mieux que vous et moi l'énormité du pouvoir de la cybernétique, du moins en ont-ils l'usage, et en font-ils usage.
Tiens, encore une info que j'ignorais: « La dalle de verre des smartphones est recouverte d'une substance qui accumule les charges électriques (à base d'indium, un métal rare). Le contact du doigt sur la dalle suffit à provoquer un transfert de charge, le doigt absorbant "le courant de fuite". Le déficit de charge est quantifié avec précision par les capteurs situés aux quatre coins de la plaque » (p.280). Suit malheureusement une salade sur « l'appétence du corps à faire signe vers autrui, à être en relation », puis sur « cette ouverture primordiale du corps, jusqu'à en faire l'un des plus puissants instruments de contrôle jamais imaginés » (p.281). La peste soit des psycho-sociologues et de leur bla-bla !
Bon, on s'achemine vers la fin de l'ouvrage de Gérard Dubey et Alain Gras, oscillant entre les truismes (« Cette délocalisation du travail fait directement obstacle à la formation de collectifs. » (p.298), sans doute pour parler de la dislocation des "corps intermédiaires", partis ou syndicats) et quelques épiphanies goûteuses à souhait, du genre de : « Au temps intermittent d'une électricité "terrestre" répond ainsi une "histoire désorientée", qui réinvestit la multiplicité des temps sociaux » (p.319), où il nous est proposé, par exemple, de « désencapsuler le temps » [pourquoi pas juste "décapsuler" ?] (p.320), et où l'on nous annonce l'ère d'une « ontophanie numérique » (p.324). Je l'ai dit au début de ce billet : pourquoi faire simple quand il est plus rigolo de faire compliqué ?
Alors qu'est-ce que je retiens de la lecture de ce curieux bouquin ? C'est que, au-delà de l'obstacle langagier et conceptuel et si j'ai bien compris ce que j'ai cru comprendre, les auteurs se rangent du côté d'un écologisme critique, mais finalement optimiste. Ils se présentent en effet, pour conclure « en sismologues plutôt qu'en collapsologues » (p.335).
Je regrette seulement que, pour un sujet passionnant porté par ce titre génial (La Servitude électrique), on ne fasse pas un effort de lisibilité pour se rendre accessible au plus grand nombre, et pour cela qu'on fasse emprunter au lecteur bien des déviations, dont pour ma part je me serais volontiers passé du détour. Je regrette aussi qu’un sujet aussi brûlant ne soit pas défendu de façon plus percutante.
Voilà ce que je dis, moi.
Note : Je garantis l'authenticité de la subjectivité de tout ce qui est écrit ci-dessus, exception faite des citations, parfaitement objectives quant à elles, quoique sélectionnées par mes soins.
09:00 Publié dans ECOLOGIE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : écologie, la servitude électrique, gérard dubey, alain gras, sociologie, anthropologie, collapsologie, centrale nucléaire bugey, lénine, les soviets plus l'électricité, socialisme, journal le monde, ukraine, marioupol, irpin
dimanche, 13 mars 2022
LE "MONDE" ET L'ETAT DE LA GAUCHE
POUR CHANGER LE MONDE, LA GAUCHE DOIT CHANGER DE MONDE.
Le Monde est un journal sérieux. C'est même (c'était ?), paraît-il, LE journal de référence. Nicolas Truong est journaliste au journal Le Monde. C'est donc un journaliste sérieux : c'est lui qu'on envoie au front. Il a publié dans le numéro daté samedi 5 mars une magnifique double page, orné sur la deuxième d'un joli, symbolique et attendrissant dessin de belle surface, et d'une facture excessivement féminine, signé Christelle Enault.
Nul doute que Nicolas Truong est un bon journaliste, et un journaliste consciencieux. Il se contente ici, modestement, de rendre compte d'un certain nombre de lectures qu'il vient de faire : des ouvrages récents consacrés à des analyses des raisons de la déconfiture de plus en plus flagrante de tout ce qui s'est longtemps appelé la GAUCHE. Il s'efforce de coudre ensemble les propos divers, chatoyants et bigarrés des nombreux experts qui interviennent pour signer le constat de décès et le procès verbal d'autopsie expliquant les causes de la mort, elles-mêmes pleines de bigarrures. On ne s'étonnera donc pas que le tableau d'ensemble que la lecture de cet article procure, ressemble au costume d'un Arlequin gesticulant plutôt qu'à un tailleur Chanel porté par une femme élégante lors d'une soirée chic.
Le journaliste commence par un curieux panorama des tendances qui tiraillent les gens qui se sentent "de gauche" : on se demande d'abord ce que peut bien être un "communisme institutionnel". L' "écologisme" donne lieu à un joli gloubi-boulga, où se mélangent "récit émancipateur" et "réchauffement climatique", et où l'écologie "peine à intégrer les révolutions de la pensée du vivant" : prenez ça dans la figure ! Truong tient à faire une place au "trotskisme", cette amibe qui se prend pour un être vivant chaque fois que se profile une présidentielle. Il achève ce tour de table sur l'improbable mouvance insurrectionnelle : je me demande s'il pense à Julien Coupat (L'Insurrection qui vient) ou aux troupes très mobiles qui viennent aux manifs pour casser du flic et des vitrines et donner au gouvernement un prétexte pour casser du manifestant.
Vient ensuite le plat de résistance : les noms d'auteurs défilent, accompagnés du titre de leur ouvrage ou de leur titre professionnel, voire universitaire. Nicolas Truong sème ses petits cailloux blancs : ici un stéréotype qui ne saurait renier ses origines vasouillardes et benoîtement orientées — "avènement d'une société du commentaire où s'est engouffrée la mouvance néoréactionnaire". Ça y est, l'étiquette est collée, pas besoin d'argumenter ou de nommer l'ennemi, on peut y aller dans l'esbroufe confortable. Sans compter que le vocable "mouvance" se prête à merveille à toutes sortes de lectures désobligeantes.
Là une formule étrange : "Olivier Ferrand, fondateur du laboratoire d'idées progressistes" : qui nous dit ce qu'est ce "progressisme"-là ? S'agit-il des idées qui réclament une plus juste redistribution des richesses produites ? Ou bien de celles qui brandissent la défense de toutes sortes de minorités qui "luttent contre les normes excluantes" d'une majorité et d'une société intolérantes ? On ne saura pas.
Ailleurs une expression discutable : par exemple, "une classe politique largement désintellectualisée", sans doute pour suggérer que, vu la médiocrité de nos politiciens, tous plus premiers-de-la-classe les uns que les autres, il n'existe plus d'hommes d'État en mesure de « se faire une certaine idée de la France », raison pour laquelle ils délèguent le souci de penser à des "think tanks" qui ont pour mission de trouver les éléments de langage capable de donner au mariage de la carpe et du lapin tout le lustre qu'il mérite.
Mais parlons des auteurs et de leurs idées. Le politiste Rémi Lefebvre pense que "la gauche est un monde défait". Le constat est imparable. Tout va bien, jusqu'à ce que Laurent Jeanpierre assigne à la gauche le devoir de "se détacher de ses atavismes et de ses identités partisanes arrimés au XX° siècle". Mais pourquoi faut-il qu'un illuminé ramène sa fraise et sa sociologie avec des "atavismes" et des "identités partisanes" ? Du coup, on n'y comprend plus rien. Bon, je vois là, plus ou moins, une sommation faite à la gauche de se "moderniser", c'est-à-dire de se convertir à la version sociétale du "progrès", et d'abandonner les classes laborieuses à leur sort. C'est admettre que le capitalisme a triomphé.
Je passe sur quelques oiselleries de Mme Marion Fontaine, qui décochera plus loin ce trait amusant : "Nous assistons à l'effritement du Parti socialiste français, qui a sans doute rempli sa mission historique". Je ne sais pas pourquoi je trouve cette phrase hilarante. Peut-être le Parti socialiste est-il félicité d'avoir, en se couvrant d'opprobre (mariage homosexuel, loi El Khomri, ...), anéanti la crédibilité de tout ce qui ressemble à une force de gauche ?
J'ai bien envie de passer aussi sur le fameux rapport de "Terra Nova" de 2011, vous savez, ce "think tank", dirigé par le médiocrate pusillanime Thierry Pech, et qui préconise de ne plus centrer la doctrine de la gauche sur la classe ouvrière, au motif que "la nouvelle gauche a le visage de la France de demain : plus jeune, plus féminin, plus divers, plus diplômé". Un gros coup de badigeon sur les vieilleries ouvrières et de "modernisation" : quelle marge de manœuvre le capital laisse-t-il aux tenants des anciens idéaux qui ont fait la Révolution ? Pas grand-chose : la "bienveillance", le "care", l'inclusion des exclus, quelques autres babioles. Des "valeurs de gauche", quoi, histoire de ne pas avoir tout perdu. Le capital peut dormir tranquille.
Personnellement, je comprends que la classe ouvrière, et plus généralement les classes populaires, aient laissé tomber les partis de gauche, tous coupables de trahison, pour se tourner vers des gens (les Le Pen et leurs variantes) qui prenaient en compte, au moins dans leurs discours, leurs préoccupations, y compris ce satané conservatisme social si mal vu par la "nouvelle gauche".
On n'y peut rien : le bas peuple tient à des structures éprouvées et à des traditions sûres, et se méfie à cet égard de toutes les formes d'innovation. Certains peuvent bien juger cela arriéré ou insupportable, et la propagande véhiculée ne s'en prive pas, au nom du "progressisme", n'en doutons pas, reste que les "vrais gens" sont comme ça et pas autrement. S'en prendre avec hauteur ou hostilité aux réticences à la frénésie d'innovation sociétale, c'est mépriser les gens simples, les "gens de peu".
Peut-être est-ce après tout une simple histoire d'offre et de demande : quand les partis communiste, socialiste, radical de gauche et tutti quanti se sont vu préférer les épouvantails d'extrême droite par leur clientèle traditionnelle, ils ont modifié leur offre, pour ne pas finir trop vite exsangues, en direction d'une clientèle "rénovée". C'est humain : tout le monde, y compris une structure, veut "persévérer dans son être". Remarquez que ça n'a pas empêché les deux grands partis de gauche d'être obligés d'abandonner leur vaisseau de croisière (Colonel Fabien, Solférino) pour se réfugier sur une coquille de noix au fur et à mesure de leurs avanies électorales.
Qu'entendent Marion Fontaine et son acolyte le sociologue Cyril Lemieux par "effondrement du monde ouvrier et de ses institutions paternalistes" ? "Paternaliste", ça sent déjà son mépris du "moderne" pour l'"archaïque", mais ne faudrait-il pas parler, plutôt que d'effondrement, de la désertification industrielle de la France, quand les coalitions d'actionnaires ont obtenu des grands conseils d'administration l'embellissement des dividendes par la vente des forces productives à la Chine ? Voir sur ce sujet la B.D. de Benoît Collombat et Damien Cuvillier Le Choix du chômage.
Une petite mention à Nicolas Mathieu, écrivain et "transfuge de classe", à ce qu'on nous dit, qui parle d'une "gauche hypokhâgne" à égalité avec une "gauche bac pro" : on sent qu'ici le ver est déjà dans le fruit. Une petite mention également aux écrivains libertaires Jean-Pierre Garnier et Louis Janover, qui parlent un peu gentiment des "renoncements" du Parti Socialiste, et à Rémi Lefebvre qui évoque plus justement cette "deuxième droite" qui a, sous François Hollande, "abîmé la gauche" et "très durablement discrédité le PS". Pauvre Anne Hidalgo, envoyée au casse-pipe par ses propres frères d'armes !
Bruno Karsenti est philosophe et il n'aime pas trop le peuple, expliquant que "la gauche est à la fois minée par la puissance du libéralisme et la prégnance du conservatisme". Foutu conservatisme : encore un de ces "science-humanistes" bavards, qui voudrait bien inculquer aux gens ordinaires un peu de sens de la modernité, formater les hommes d'après l'image qu'il s'en fait et les débarrasser de leurs haïssables préjugés et "stéréotypes" (de classe, de race, de sexe, de norme, etc.).
Preuve que plus personne ou presque ne sait où il en est, "La gauche démocratique et modérée ne s'est pas volatilisée, elle vote Macron". Encore un de ces foutus politistes qui disent tout et le contraire de tout, sans le dire, mais tout en le disant. Car enfin, si une gauche vote Macron, est-ce une gauche ? Non ! Heureusement Bruno Karsenti rétorque : "Emmanuel Macron n'est pas social-démocrate, il incarne le sommet de son dévoiement".
Nicolas Truong aborde ensuite le cas de la "gauche écologique et sociale". C'est pour mentionner aussitôt le feu de paille de l'espoir que certains avaient mis dans le virus et dans un hypothétique "monde d'après", où les peuples, les penseurs, les industriels et les gouvernants auraient réfléchi et admis qu'on faisait fausse route. Il n'en a rien été, comme on le constate tous les jours : "Ce qui n'a pas évité un retour à la normale", "normale" étant écrit sans guillemets par le journaliste lui-même.
Citons au passage la grosse niaiserie du renommé et néanmoins sociologue Bruno Latour, qui ose affirmer que "l'écologie, c'est la nouvelle lutte des classes". Laissons-le à ses lubies, quoi qu'il dise de sensé sur le productivisme et l'extractivisme qui gangrènent la planète et les bipèdes qui en foulent le sol. Comment fait-on, comme le suggère le philosophe Pierre Charbonnier pour : "se réapproprier un progressisme social détaché des illusions de la croissance" ? Qu'est-ce que ça peut bien vouloir dire, qu'il faudrait "une politisation des sciences sociales" ? La tâche n'est-elle pas pour l'essentiel accomplie ? Et que signifie : "Il convient de mêler socialisme et écologie, ces deux courants apparentés, mais dont la ligne est encore "mal tracée"" ? J'ignorais que socialisme et écologie fussent des "courants", et encore plus : qu'ils fussent apparentés (voir ce qui est dit plus haut de l'extractivisme comme matrice du socialisme : il faudrait savoir).
Bon, j'arrête là. Il resterait bien quelques menues considérations des uns et des autres à mentionner, mais je crois suffisants les éléments de preuve accumulés. Preuve de quoi ? Oh, pas grand-chose : juste le terrible champ de bataille de thèses, d'hypothèses et de foutaises qu'est devenu le problème de la gauche, depuis que la réalité de la protection des classes les moins favorisées a été laissée aux soins des forces du marché. Juste l'innommable bouillie déversée par des intellos de tout acabit sur une situation d'ensemble que plus personne ne comprend et ne maîtrise.
L'article de Nicolas Truong est finalement assez honnête, en ce qu'il reflète assez bien, malgré quelques bizarreries, la couleur et la substance de la panade économique, politique, sociale, intellectuelle et morale dans laquelle le temps présent nous fait patauger, tous tant que nous sommes, gens ordinaires.
Mais il y a une autre tendance qui ressort en relief de ce tableau chaotique : l'émergence à "gauche" (on se demande ce qui les rattache à la gauche) de nouvelles forces : les jeunes, les femmes, les minorités, les diplômés, et des "divers", c'est-à-dire une pléiade de groupes d'une splendide hétérogénéité, dans lesquelles j'ai du mal à voir autre chose que divers segments d'une clientèle exigeante à l'égard des entrepreneurs politiques et des produits qu'ils proposent sur le marché.
Voilà ce que je dis, moi.
Note : « Or il semblerait ne plus y avoir de "monde d'après", même à Saint-Germain-des-Prés, pourrait-on avancer avec Léo Ferré ». Mais que je sache, "il n'y a plus d'après à Saint-Germain-des-Prés", cher M. Truong, est une chanson de Guy Béart, paroles et musique.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : journal le monde, journalistes, nicolas truong, christelle enault, réchauffement climatique, la gauche, écologie, insurrection, olivier ferrand, progressisme, néoréactionnaire, think tanks, rémi lefebvre, laurent jeanpierre, sciences humaines, sciences sociales, marion fontaine, fondation terra nova, thierry pech, le pen, extrême droite, cyril lemieux, benoît collombat, damien cuvillier, bd le choix du chômage, nicolas mathieu, transfuge de classe, jean-pierre garnier, louis janover, parti socialiste, françois hollande, anne hidalgo, bruno karsenti, conservatisme, bruno latour, pierre charbonnier, politique
vendredi, 16 juillet 2021
EN ROUTE POUR LE MONDE D'APRÈS
Le général Le Cointre n'est pas n'importe qui : chef d'Etat-Major des Armées de la France. Comme tel, je suppose que lui arrivent en pagaille des informations qui ne dépassent pas un cercle plus ou moins réduit, plus ou moins ouvert ou tenu au secret, et qui touchent l'évolution des forces en présence, de la marche des puissances, des stratégies, des groupes émergents et des déstabilisations potentielles de ce qu'on a coutume d'appeler "l'ordre du monde". Informations qui ne regardent en aucune manière le vulgum pecus que nous sommes, et dont le vulgum pecus en question est soigneusement tenu à l'écart. Lecointre en connaît donc un rayon, et il sait de quoi il parle.
J'imagine que, en accordant une interview au journal Le Monde dans le numéro daté 14-15 juillet 2021 (propos recueillis par Elise Vincent), il s'exprime exclusivement en tant que militaire de très haut rang (5 étoiles), et qu'il mesure le poids de ses mots. C'est précisément dans cette mesure que le titre retenu par Le Monde pour intituler l'interview peut faire peur.
La citation exacte : « Il y a une dégradation continue de l'ordre du monde, nous le constatons tous. Cela se voit notamment en Ukraine, en mer Noire, en Méditerranée orientale. Cela s'observe aussi en Irak, en Syrie, avec une résurgence de Daech. La situation n'est toujours pas apaisée non plus avec l'Iran, elle se dégrade au Mozambique, au Liban, et je ne suis pas certain que les tensions dans les Balkans aient été définitivement résolues. » Le reste de l'interview est assez frustrant, pauvre en informations concrètes et loin de révéler le moindre petit secret. Il se contente d'offrir un panorama général de l'état actuel de l'armée française et de ses missions, et de ce qu'il faut souhaiter pour qu'elle reste une force qui compte.
Quoi qu'il en soit, le titre à lui seul ne fait qu'ajouter aux déjà multiples raisons (pauvreté scandaleuse jusque dans les pays dits riches, réchauffement climatique, catastrophes écologiques diverses, j'en passe et des meilleures) que les humains actuels ont de s'interroger sur ce qui peut arriver et de s'inquiéter du sort qui sera fait aux humains, non pas dans un futur lointain, mais dans un proche avenir, étant entendu que pour ceux de ma génération, les jeux sont faits, ou pas loin.
11:02 Publié dans L'ETAT DU MONDE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : général le cointre, chef d'état-major des armées, journal le monde, élise vincent
mardi, 06 juillet 2021
GLYPHOSATE : LE MONDE D'AVANT NE LÂCHERA RIEN
Excellentes nouvelles du côté de la défense de l'environnement et de la santé humaine. C'est le journal Le Monde qui nous en informe sous la plume de l'excellent Stéphane Foucart. Les autorités sanitaires européennes (EFSA) se préparent à (langue administrative) "prendre une décision touchant la « ré-approbation »" de la célébrissime substance (en français : vont de nouveau autoriser le glyphosate, il ne faut pas se leurrer). Les entreprises qui font de l'agriculture une industrie se frottent déjà les mains.
Car pour cela, on demande aux autorités de se fonder sur des "études" fournies par les industriels (fournies par les industriels : voilà pourquoi je mettrai des guillemets au mot "études"). L'EFSA a validé vingt-cinq de ces "études" pour la prochaine démarche de réévaluation, qui doit aboutir à la décision en 2022. Ces vingt-cinq "études" [attention, il faut suivre ! et pardon pour la lourdeur] font partie d'un lot de trente-huit dans le nouveau dossier d'homologation fourni par les firmes en vue de la nouvelle autorisation. Cela veut dire que treize "études" ont été écartées : aux yeux des "régulateurs" européens, pourtant très "indulgents", ça exagérait sans doute de trop.
Mais [attention, c'est pas fini !] le lot de trente-huit appartient lui-même au corpus des cinquante-trois "études" qui avaient permis la ré-autorisation en 2017, et dont deux chercheurs autrichiens ont été finalement autorisés par la justice européenne à décortiquer la méthodologie. Pourquoi autorisés ? Parce que, jusqu'alors, il était interdit de mettre le nez dans la façon et la méthode dont ces "études" avaient été menées par les laboratoires des industriels sur les effets de leur bienfaisant glyphosate.
Pourquoi était-ce interdit ? Probablement quelque obscur secret de fabrication ? Toujours est-il que le justice a tranché. Siegfried Knasmueller et Armen Nersesyan ont donc pu examiner à la loupe la méthodologie des cinquante-trois "études" "scientifiques" touchant la "génotoxicité" du glyphosate, sur lesquelles les autorités sanitaires européennes s'étaient appuyées en 2017 pour donner satisfaction aux lobbies industriels.
Notez que le boulot de ces deux chercheurs n'était pas de savoir si le glyphosate était du caca ou du boudin : ils voulaient juste savoir dans quelle mesure ces "études" avaient respecté les protocoles méthodologiques normalement en vigueur dans les analyses et expériences scientifiques les plus sérieuses et rigoureuses.
Et il y a de quoi tomber de l'armoire ! Deux études (sans guillemets pour le coup) sur cinquante-trois (7%) se sont révélées conformes ! Dix-sept sont considérées comme « partiellement fiables ». « Toutes les autres, soit plus des deux tiers (68%), sont considérées par les deux experts comme "non fiables" ». C'est dit : deux tiers des études sont des bobards enrobés au sirop d'escroquerie. Ah, se dit le quidam ordinaire, voilà donc pourquoi les industriels tenaient leurs "études" en sécurité dans des coffres-forts, bien à l'abri des regards indiscrets. Et c'est sur ces impostures que s'appuie la décision de Bruxelles. Ça, c'est l'Europe !!!
Voilà un mauvais résumé de l'article (difficile à suivre pour un non-spécialiste mais important) de Stéphane Foucart paru dans Le Monde daté 4-5 juillet 2021. Il va de soi que le ton du journaliste observe la plus stricte neutralité, contrairement au présent billet : je ne suis pas journaliste, et je m'estime en état de légitime défense.
Il ressort de tout ce galimatias abscons et rébarbatif que les industriels dans le monde d'après sont en tout point semblables à ceux du monde d'avant. Ils vous pondent en quantité des "études" "scientifiques" débouchant sur des conclusions qui leur sont favorables, mais dans lesquelles d'authentiques scientifiques désintéressés n'auraient strictement pas eu le droit de mettre le nez pour cause de secrets industriels, si la justice n'avait pas vu les choses autrement. Concluez vous-mêmes quant à la sincérité de tous ces gens. Et quant à la qualité des "études" ainsi produites.
Mais il ressort aussi — et ça c'est beaucoup plus grave — que les autorités sanitaires se rendent complices des manœuvres de ces mammouths de l'agro-industrie. Car il y a forcément des complicités au sein même des instances régulatrices, des gens plus ou moins de bonne foi, plus ou moins intéressés, plus ou moins vendus, plus ou moins achetés, plus ou moins convaincus. Et on comprend : comment résister à certaines pressions plus ou moins souriantes, plus ou moins aguichantes, plus ou moins pressantes, voire plus ou moins menaçantes, sait-on ?
Moralité ? L'industrie agro-alimentaire ressemble fort à un repaire de pirates. L'EFSA a tous les airs d'un fruit pourri. Les autorités européennes se comportent comme des marionnettes. Et les cinq cents millions d'Européens sont des gogos.
Voilà ce que je dis, moi.
Note : Naomi Oreskes, dans Les Marchands de doute, pointait déjà l'imparable perversité du système dans lequel de vrais scientifiques sont constamment confrontés à des gens sans foi ni loi mais très puissants, qui les somment de démontrer qu'un poison est nocif. Dans cette affaire, LE DOUTE PROFITE AU CRIMINEL. La science ne peut pas grand-chose contre le cynisme, la mauvaise foi et la puissance financière de ces cartels de la drogue dont tous nos politiciens baisent les babouches en signe d'allégeance. Et le seul impératif de ce genre de criminel est : plus je t'embrouille le débat public à coups de recherches scientifiques bidonnées, mieux je me porte.
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dimanche, 02 mai 2021
ALORS ÇA VIENT, LE MONDE D’APRÈS ?
Dessin de GDB (pour Gueule De Bois ?) piqué sur Fesse-de-bouc.
La réponse à la question posée par le légume ci-dessus qui s'impatiente au fond de son fauteuil club, tout le monde en a maintenant une idée assez claire. Je n'insiste pas : ce sera JAMAIS.
La preuve : même les syndicats (en ordre dispersé — parfois par la police) ont recommencé comme autrefois, à l'occasion du 1er Mai, à faire visiter quelques centres-villes aux radios et télés du pays — qui rappliquent en masse dès qu'elles reniflent (espèrent) qu'il va y avoir de la castagne et des vitrines brisées (autrement dit du spectacle, de l'audience et du fric).
Le président, lui, n'a pas cessé d'emballer des discours dans de jolies boîtes à bonbons enrubannées de rose ou de menacer son peuple d'une fessée magistrale, pendant que les personnels hospitaliers, dégoûtés, quittent l'hôpital pour changer de métier ou arrachent leurs derniers cheveux en des gestes convulsifs de rage impuissante, en attendant la "quatrième vague" annoncée.
Et dans le même temps, le journal Le Monde nous apprend qu'un rapport fondé sur des centaines d'études scientifiques alerte (mais alerte qui, au fait ?) sur la folie de l'humanité, qui continue à déverser dans tous les océans de la planète des quantités monstrueuses de toutes sortes de gentillesses chimiques ou autres, issues de l'industrie pour être consommées, puis transformées en autant de déchets que la même humanité met à l'abri dans les profondeurs marines, et qui tournent leur pouvoir de nuisance sur les capacités de reproduction des êtres végétaux ou animaux qui vivent dedans, quand ils ne les tue pas (pour que ça aille plus vite, sans doute).
Il serait temps qu'on se mette à la rédiger, la Déclaration Universelle des Limites Humaines. Cela ferait au moins une belle affiche de plus à apposer aux murs des établissements d'enseignement du monde entier — et que personne ne lirait. J'ai essayé de lire dans le temps la Déclaration Universelle des Droits de l'Enfant. J'ai renoncé tellement ça suinte la bonne intention et les grands principes, que ça les rend antipathiques et presque nauséabonds.
Quant aux autres légers problèmes que se crée l'humanité — financiarisation de l'économie, y compris de l'immobilier, surarmement de beaucoup de nations agressives, réchauffement climatique ... (je cite pour l'anecdote) — mettons qu'on n'en parlera pas. Pour ne pas désespérer complètement le légume qui s'impatiente au fond de son fauteuil club.
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samedi, 23 janvier 2021
"LE MONDE" SE DÉBALLONNE
Je serais à la place de Jérôme Fenoglio, je rentrerais sous terre pour me cacher. Le journal Le Monde, qu'il dirige, à présenté ses excuses à tous ceux qui pourraient se sentir blessés par le dessin de Xavier Gorce paru auparavant. Des excuses ! J'aurais tellement honte que je refuserais l'invitation de France Inter à venir expliquer l'attitude de mon journal. Mais non ! Le pire, dans l'affaire de Xavier Gorce — ce remarquable dessinateur de presse qui y plaçait ses "Indégivrables", des sortes de pingouins se contentant de quelques traits pour délivrer des points de vue très souvent marrants sur le monde tel qu'il cloche —, c'est que Jérôme Fenoglio assume.
Droit dans ses bottes, il explique aux micros que les collègues s'empressent de lui tendre (pensez : le directeur du Monde en personne ! Les micros sont déférents avec les gens de pouvoir) : "Un journal est en droit de refuser de publier des propos ou un dessin qui ne sont pas conformes à son orientation" (je cite en substance et dans les grandes lignes).
Le pire, c'est que Le Monde l'a publié, le dessin qui fait polémique ! Et ce dessin, je ne suis pas le seul à le trouver excellent : le tiédasse Plantu lui-même, qui s'apprête à prendre sa retraite de la "une" du Monde, l'a déclaré sur France Culture.
Et vous savez pourquoi je le trouve excellent, ce dessin ? D'abord parce qu'il jette une lumière inattendue, donc marrante – que certains jugeront incongrue – sur une question qui agite toute la médiasphère jusqu'au tohu-bohu (c'est à Freud qu'on doit l'expression "tohu-bohu de l'inceste", ce n'est peut-être pas dans son célèbre livre Totem et tohu-bohu) ; ensuite parce j'ai immédiatement pensé à un autre dessin formidable, mais qui traitait simplement, il y a fort longtemps, d'un paradoxe temporel tout à fait science-fictionesque : un type remonte le temps, rencontre une femme qui se trouve être sa mère-mais-il-ne-le-sait-pas, l'épouse, et je vous passe les déductions embrouillées et jubilatoires que Gotlib en tirait (à moins que ce ne soit Goscinny : je ne me rappelle plus si c'était dans les Dingodossiers ou la Rubrique-à-brac).
Honte à vous, monsieur Fenoglio ! Honte au journal Le Monde ! Quelle infamie ! Quelle déchéance pour le soi-disant "journal-de-référence" ! Bon, les optimistes se diront que Le Monde n'a pas emboîté le pas au New York Times, qui est allé jusqu'à bannir de toutes ses pages toute intervention dessinée quelle qu'elle soit. Mais là on est dans les folles dérives de la pudibonde, puritaine, hypocrite Amérique.
J'en conclus que l'Amérique n'a pas fini d'exporter – et jusque dans des pays si fiers d'habitude pour prendre la défense de la liberté d'expression, et quelques journalistes d'exception l'ont payé de leur vie !!! – son exécrable "politiquement correct", où ce sont toutes les minorités qui dictent leur loi à la majorité et qui, au moindre chatouillis ressenti à la surface de leur "sensibilité", se débrouillent pour faire taire ceux qu'ils considèrent comme des agresseurs ! Dans le cas du dessin de Xavier Gorce, on peut voir qu'un journal comme Le Monde a une pétoche épouvantable. Tout ce qui risquerait de sonner à la porte du journal en se présentant sous les traits d'une victime d'inceste ou d'un individu "transgenre" est comme le diable en personne.
C'était donc ça, le "monde d'après" qu'on nous promettait ? Monsieur Fenoglio, je n'ai qu'une grosse chose à vous dire : "Merde" !!!
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mercredi, 13 janvier 2021
UNE IMAGE DE LA FEMME ...
... PARMI D'AUTRES.
Isabel Marant (créatrice de mode) photographiée pour Le Monde (12 janvier) par Martin Colombet.
J'ose imaginer que certain aspect de la photo n'a pas été voulu, recherché, prémédité (affiché ? revendiqué ?).
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mardi, 08 décembre 2020
DE MILA À SAMUEL PATY
« Va bien te faire fourré sombre pute je te souhaite de mourir de la façon la plus atroce qui puisse exister et si jamais ça tarde. Je m’en chargerais moi-même. Je me ferais un réel plaisir de l’acéré ton corps avec mon plus beau couteau et d’aller laisser pourrir ton corps dans un bois ». Voilà le texte d’un aimable mail – parmi une foule d’autres du même acabit – reçu par une adolescente en France en 2020, tel que le journal Le Monde le reproduit – textuellement, fantaisies linguistiques comprises – dans son numéro daté du 28 novembre.
L’adolescente s’appelle Mila, et personne ne lui a encore coupé la tête. Il faut dire qu’elle n’est pas tendre avec tout ce qui est musulman, islamique, islamiste, mahométan ou coranique : « Votre religion c’est de la merde, votre dieu, je lui mets un doigt dans le trou du cul. Merci. Au revoir. » Si un adepte particulièrement susceptible lui fait « une Samuel Paty », comme le lui promettent des internautes, elle saura pourquoi, et il se trouvera certainement quelques citoyens bien français (vous savez, ces gens de gauche prompts à dénoncer l' "islamophobie") pour dire qu’elle « l’aura bien cherché », et qu’elle s’est livrée à des provocations inutiles et choquantes (mais rien d'illicite selon le procureur).
Samuel Paty, lui, ne s’est pas livré à une provocation. C’est presque pire : il a entrepris, contre toute raison raisonnable, d’expliquer à des gens inaccessibles à cette idée, pour quelles raisons il était permis en France de se moquer des religions, en prenant pour exemple l’objet de fixation des passions du moment : les caricatures de Mahomet. C’est permis, il y a même des lois pour cela. Mais dans la réalité, combien de musulmans sont assez "évolués" pour déclarer comme Tareq Oubrou, grand imam de Bordeaux (Le Monde, 2 décembre) : « Islam de France : aux laïcs la gestion administrative, aux religieux la religion » (c'est le titre de sa tribune) ? Le brave homme se trompe ou se prend à rêver : il n'y a pas de laïcs en islam, ou si peu que rien, pas de laïcité, et le vrai musulman ne comprend rien à la notion et à ce qu'elle implique.
Combien de musulmans vivant en France sont assez évolués pour simplement admettre le principe de la laïcité, qui fait de la croyance religieuse une chose purement privée ? Pas lourd. Car dans l’islam, la vie religieuse est rigoureusement inséparable de la vie civile, de la vie sociale et de la vie politique. Ne pas oublier que "musulman" signifie "soumis à Dieu" : le bon musulman ne perd jamais de vue l’ombre d’Allah, qui le suit, l’observe et l’entend à tout moment de son existence. Pour un musulman, le religieux imprègne la totalité de la vie.
Alors que pour les « vieux Français » (on disait "vieux chrétien" en Espagne il y a quelques siècles), la loi de 1905 est une chose du passé, entendue, admise, classée, au point que plus personne n’en parlait jusqu’à ce qu’on se rende compte qu’un intrus s’était immiscé dans ce tableau tranquille, si l’on excepte quelques abcès, furoncles ou apostèmes (catholiques en 1984 et juifs par épisodes) crevés plus ou moins vite et plus ou moins complètement. Pour ce qui est des religions, la France pouvait être considérée comme un pays en paix, jusqu’à ce que certains trublions, au nom du père Mahomet, mettent très ostensiblement les pieds, la barbe, le hidjab et maintenant le poignard dans le plat.
Là-dessus, depuis les crimes de Mohamed Merah (2012), les hauts responsables politiques ou autres se sont échinés à répandre l’idée qu’il faut surtout se garder de confondre « islamique » et « islamiste radical ». Je voudrais bien que ce soit possible et réaliste, mais je me suis assez vite demandé si la distinction n’était pas de pure forme, académique et vaine. Et ce n’est pas la mort atroce de Samuel Paty, décapité en pleine rue, qui m’a amené à me reposer la question : son meurtrier est incontestablement un islamiste radical, qui s’est convaincu, entraîné, qui a soigneusement traqué la cible que quelqu’un lui a désignée et mis son projet à exécution.
Il en va tout autrement du cas de Mila, victime toujours vivante des tombereaux de haine déversés contre elle depuis qu’elle a eu l’audace de refuser de « sortir » avec un garçon qui se présentait comme musulman (si je me souviens bien). Depuis qu’elle l’a repoussé en lui disant ce qu’elle pensait de sa religion, toute une islamosphère a pris feu et menace d’y jeter l’adolescente, qui en a inconsidérément rajouté quelques couches.
On me dira que ce sont les « réseaux sociaux », qu’après tout ce ne sont que des mots, et qu’ils sont, les uns et les autres, loin d’être l’expression de tout ce que la France compte de musulman. J’en suis d’accord. Je fais simplement remarquer que la haine à l’encontre de la jeune Mila constitue le point où se réunissent un grand nombre (combien ?) de gens, et que s’il faut qualifier tous ces gens d’ « islamistes radicaux », les Français peuvent commencer à avoir peur, parce que ça signifie que nous avons sur notre sol la tête de pont d’une armée ennemie. Or je crois justement que ce ne sont pas des islamistes radicaux qui s'en prennent à Mila, mais des musulmans plus ou moins ordinaires. Je dirais plutôt que nous assistons à une crispation forte de ces couches de la population sur la partie religieuse de leur identité.
On peut considérer que cette haine pour l’adolescente, largement partagée, exprime le sentiment, non d’un groupuscule d’extrémistes prêts à l'action violente, mais d’une partie non négligeable des musulmans de France, probablement des jeunes générations, dont le poil se hérisse dès qu’un outrage à leur dieu, à leur prophète ou à leur religion montre le bout de l’oreille.
J’en veux pour preuve les sept cent quatre-vingt-treize « signalements » parvenus sur le bureau du ministre de l’Education, suite à l’hommage rendu à Samuel Paty dans les collèges et lycées, et dont 17% ont été rangés dans la colonne « apologie du terrorisme » et 5% dans la colonne « menaces de mort ». Là encore, on me dira que ce sont des jeunes, qu’ils ne savent pas ce qu’ils disent.
Mais je répondrai par une question : pour 793 cas « signalés », combien d’autres ont été purement et simplement passés sous silence par des personnels enseignants excédés de la pression qui pèse sur eux en cette matière, et qui ne tiennent pas à charger la barque ? Et pour un imam (celui de Villiers-le-Bel) condamné à dix-huit mois de prison pour apologie du terrorisme (Le Monde, 28 novembre), combien restent en liberté pour prêcher la haine tous les vendredis à la prière ? Et combien de musulmans ordinaires répondent aux sondeurs qu'ils placent la charia au-dessus des lois françaises ?
On l’aura compris : mon hypothèse est que la haine pour tous ceux qui critiquent l’islam si peu que ce soit n’est pas le fait d’un petit nombre d’endoctrinés fanatiques, mais qu'elle est largement partagée, constituant le socle où viennent se reconnaître d’innombrables musulmans de France. C’est une tache d’huile qui se répand dans la "communauté musulmane". Il est donc vain, et même dangereux d’ergoter à l’infini sur la nécessité de bien distinguer « islamique » et « islamiste radical », dans l’intention vertueuse de ne pas « faire d’amalgame » et pour ne pas « stigmatiser » les pauvres musulmans honnêtes qui n’ont rien à voir avec tout ça.
La raison en est que la notion de « laïcité » est vécue comme un corps étranger incompréhensible par le corps tout entier de ce qui se dit musulman en France. Pour une majorité d’entre eux, je suis d'accord : c’est une loi française, on leur dit de la respecter, ils la respectent quoique sans la comprendre et surtout sans l’intérioriser. Sans trop de risque de se tromper, on peut dire que pour un musulman, la laïcité c’est de l’hébreu.
C'est d'ailleurs dans cette mesure que certains (Houellebecq, Redeker, etc.) peuvent soutenir que l'islam est la religion la plus ... disons "mentalement attardée" : dans le vaste mouvement de l'évolution, l'islam a décidé de s'arrêter à un point "p", même s'il y a d'innombrables exceptions locales ou individuelles. L'islam dominant d'aujourd'hui (je veux dire celui qui fait le plus de bruit) propose une civilisation qui s'est arrêtée il y a quelques siècles.
Et les psychologues, les sociologues, les anthropologues auront beau me prêcher qu’il ne faut pas ci, qu’il ne faut pas ça parce que gna gna gna, je resterai convaincu de l’incompatibilité totale entre notre laïcité et cette « culture » coranique profondément ancrée dans l'esprit des croyants depuis bientôt mille quatre cents ans : il faut se convaincre, nous autres "vieux Français", que pour qu'un musulman de bonne foi comprenne l'idée de laïcité, il doit faire un effort immense.
Il n’y a plus de problème de laïcité en France, pays déchristianisé où les messes chevrotantes du dimanche ressemblent à des voyages du troisième âge : il n'y a que le problème de l’islam, résolument hermétique à la séparation du civil (social, politique, ...) et du religieux. La laïcité est en soi une négation de l'islam, et réciproquement. De Mila à Samuel Paty, c’est le même fil de haine.
Pour une mosquée fermée, pour quelques associations dissoutes, combien d’infatigables activistes en liberté travaillent au corps la communauté musulmane pour enrôler de nouvelles énergies ? Qu’ils soient wahabites ou salafistes importe peu : leur message est infiniment plus simple et efficace que la complexité odieuse d’une loi sur la laïcité que les Français eux-mêmes ne sont pas nombreux à comprendre. Les ignorants ont besoin de messages simples, rudimentaires, schématiques, et pour tout dire binaires.
Ce qui est sûr, c’est que pour un musulman, la laïcité, c’est de l’hébreu.
Voilà ce que je dis, moi.
Note : Juste pour mémoire, un billet écrit en juin 2019.
Note ajoutée le 10 décembre : Mila a été exclue de l'institution militaire qui avait accepté de l'héberger, au motif qu'elle ne peut se passer de s'exprimer sur les réseaux sociaux et que, cela étant, elle met en danger l'institution elle-même. Mila n'a pas tout compris, hélas.
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vendredi, 13 novembre 2020
13 NOVEMBRE 2015 : MONUMENT AUX MORTS
C'ÉTAIT AUSSI UN VENDREDI.
***
Stéphane Albertini
Nick Alexander
Anne-Laure Arruebo
Thomas Ayad
René Bichon
Elodie Breuil
Claire Camax
Romain Didier
Fabrice Dubois
Mathias Dymarski
Germain Ferey
Romain Feuillade
Julien Galisson
Véronique Geoffroy de Bourgies
Nohemi Gonzalez
Anne Guyomard
Mathieu Hoche
Pierre Innocenti
Milko Jozic
Jean-Jacques Kirchheim
Marie Lausch
Gilles Leclerq
Christophe Lellouche
Antoine Mary
Fanny Minot
Yannick Minvielle
Marie Mosser
Hélène Muyal
Bertrand Navarret
Franck Pitiot
Caroline Prénat
François-Xavier Prévost
Richard Rammant
Valentin Ribet
Estelle Rouat
Raphaël Ruiz
Hodda Saadi
Halima Saadi
Madeleine Sadin
Kheireddine Sahbi
Hugo Sarrade
Djalal Sebaa
Fabian Stech
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Pardon à toutes les personnes, proches ou lointaines, qui ont connu ceux que je n'ai pas cités.
Le journal Le Monde avait édifié une sorte de monument à tous les morts du 13 novembre. Les journalistes avaient contacté les proches ou la famille des victimes et esquissé le portrait de chacune de celles-ci. Puissent les quarante-trois noms cités ici parler pour tous ceux qui n'y sont pas.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : 13 novembre 2015, journal le monde, bataclan, attentat terroriste